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3 La barrique d'amontillado

La Folie ou Méphisto

Titre original : La barrique d’Amontillado, bonnet de clochettes

Odilon Redon, 1883, Paris, Musée d’Orsay

Odilon Redon Folie Mephisto Barrique Amontillado

Résumé de la nouvelle

En raison de mille injustices non précisées, le narrateur, Montrésor, décide de se venger de son ami Fortunato, un italien connaisseur en vins. Sous prétexte de lui faire goûter une barrique d’amontillado,  il l’entraîne dans le coin le plus reculé de ses caves et l’emmure vivant.

Les phrases-clé

Le plan du meurtrier ne peut réussir que parce que Fortunato est ivre :
« Un soir, à la brune, au fort de la folie du carnaval, je rencontrai mon ami. Il m’accosta avec une très chaude cordialité, car il avait beaucoup bu. Mon homme était déguisé. Il portait un vêtement collant et mi-parti, et sa tête était surmontée d’un bonnet conique avec des sonnettes. »

Avec beaucoup d’habileté, jouant à la fois sur le désir et la vanité, le narrateur accompagne Fortunato dans sa dernière descente de cave :
« La démarche de mon ami était chancelante, et les clochettes de son bonnet cliquetaient à chacune de ses enjambées.
— La pipe d’amontillado ? — dit-il.
— C’est plus loin, — dis-je — …
Il se retourna vers moi et me regarda dans les yeux avec deux globes vitreux qui distillaient les larmes de l’ivresse. »

Une fois enchaîné et emmuré, Fortunado rit encore  :
« Une très bonne plaisanterie, en vérité ! — une excellente farce ! Nous en rirons de bon cœur au palais, — hé ! hé ! — de notre bon vin ! — hé ! hé ! hé ! »

Son dernier signe de vie est dérisoire :
« J’introduisis une torche à travers l’ouverture qui restait et la laissai tomber en dedans. Je ne reçus en manière de réplique qu’un cliquetis de sonnettes. »

La nouvelle : une lecture possible

Le triomphe du paranoïaque sur l’alcoolique : la nouvelle illustre la prise de possession progressive d’un esprit calculateur – qui se dit rationnel tout en étant obsédé par un besoin de vengeance totalement irrationnel, sur un esprit faible : vaniteux, jouisseur, amical et crédule.

Plusieurs thèmes paradoxaux s’entrelacent  : l’infortuné Fortunado ; la victime qui rit ; l’ivresse froide de la vengeance opposée à l’ivresse joyeuse ; le vrai fou, qui n’est  pas celui que son costume désigne.

Le clin d’oeil de l’artiste

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Le fusain : une lecture possible

Le fusain  illustre le moment de suspens où Fortunado se retourne et regarde son assassin  « dans les yeux, avec deux globes vitreux qui distillaient les larmes de l’ivresse ».

Ce regard en arrière pourrait amorcer un retournement de situation, la remontée vers le réel, depuis les bas-fonds du mensonge et de l’ivresse. Mais bien au contraire, il signe pour Fortunado la perte définitive de toute lucidité : Redon nous montre l’instant précis où les yeux fous et les clochettes du fou s’assimilent.

A l’arrière-plan,  on devine une porte condamnée par des clous : l’arcade de la porte fait écho à la courbe du bonnet. Ainsi préfigure-t-elle le destin imminent de Fortunado : bientôt ferré et condamné.

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