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1 La Femme au pantin

23 avril 2016

Il faut attendre la toute fin du XVIIIème siècle pour que le thème de l’homme mené par la femme, jusqu’alors illustré par toute une série de volatiles (voir L’oiseau chéri), trouve une nouvelle incarnation.


Le Pantin (El Pelele)

Goya, 1792, Prado, Madrid

1792 Goya El pelele Prado carton tapisserie

Cette peinture fait partie de la septième série de cartons pour tapisserie destinée au bureau de Charles IV dans le palais de l’Escurial.

« Le plaisir cruel consistant à faire sauter un individu dans une couverture porte un nom en français, c’est l’action de berner. « Berner », c’est selon le Trésor de la Langue Française,  « Molester quelqu’un », le faire sauter dans une « berne » c’est-à-dire une « grande pièce d’étoffe et particulièrement de laine ». Jean-Yves Cordier, voir son blog  lavieb-aile.com.

Ainsi, selon le contexte et les époques, on a pu  berner des gens (par exemple Sancho Panza), des chiens, ou plus paisiblement un  pantin. Ce jeu, pratiqué pratiqué lors des fêtes populaires comme rite d’adieu au célibat, avait aussi une portée symbolique : illustrer le pouvoir des femmes sur les hommes.

Remarquons qu’en cette fin du XVIIIème siècle, ce pouvoir reste singulièrement limité : il faut s’y mettre à quatre pour faire s’envoyer en l’air la marionnette. D’où l’impression que cette image équivoque, plutôt que d’illustrer l’impuissance de l’Homme, montrerait l’effet mécanique que font sur lui toutes ces filles.


1792 Goya El pelele Prado carton tapisserie detail
Ejecté du drap de lit pour s’y renfoncer aussitôt, le Pantin, trahi par sa natte,  est transformé en engin de coït.

Site du Prado : https://www.museodelprado.es/coleccion/obra-de-arte/el-pelele/a1af2133-ff7b-4f47-a4ac-030cb23cb5b6

1815-25 Goya Disparates el pelele

Goya
Série Los Disparates  1815-1823

Dans ce remake post-napoléonien, l’esprit  léger et souriant  a disparu. En compagnie d’un âne, réduits à des silhouettes informes, les pantins ne se réaniment pas plus que des cadavres secoués dans un linceul.


 

George_Cruikshank_-_A_Dutch_Toy_or_A_Pretty_Play-thing_for_a_Young_Princess_Huzza_March_1814_publié le 20 juin
Un jouet hollandais ou un joli joué pour une jeune princesse
A Dutch Toy or A Pretty Plaything for a Young Princess
George Cruikshank, Mars 1814, publié le 20 juin 1814

Ce 20 juin 1814, le parlement anglais débattait d’un lettre de la Princesse royale Charlotte, rompant ses fiançailles avec Guillaume d’Orange. La devise « Orange boven (Orange en haut !) » s’applique ironiquement à la situation du pantin, à la position de ses membres et aussi , plus méchamment, au jet coupé net dans son ascension. Le petit médaillon sur la cuisse, marqué FitzMa et le livre sous le pied, marqué « Lawrence dream » sont des allusions probables à d’autres soupirants, l’un actuel et l’autre passé (vicomte FitzMaurice et George FitzClarence).


1818-English-Ladies-Dandy-Toy-IR-Cruikshank

English Ladies Dandy Toy
Cruikshank, 1818

Quatre ans plus tard, Cruikshank généralise en appliquant la formule à toute anglaise opulente : la femme géante manipule du bout des gants   le pantin-dandy avec sa canne, son  haut-de forme et la queue de pie de sa redingote qui lui bat ridiculement les fesses : caractères virils minuscules face à la plénitude de la poitrine, de la robe et à la turgescence ironique de la plume d’autruche rose.


 

Bonne d'Enfant 1816-24 Georges-Jacques Gatine Costumes Parisiens Les Ouvrieres de ParisLa Bonne d’Enfant (série Costumes Parisiens : Les Ouvrières de Paris)
Georges-Jacques Gatine, 1816-24
1885 Nehlig Pour amuser tt le monde il faut danser a la ronde Chansons et rondes enfantines Weckerlin« Pour amuser tout le monde il faut danser à la ronde »
Illustration de Nehlig, 1885, Chansons et rondes enfantines, Weckerlin

Cette métaphore isolée ne passe pas la Manche : pour de longues années encore, même dans les mains d’une belle femme, le pantin reste un jouet innocent.



daumier-madame-gargantua-1866Madame Gargantua, Daumier, 1866 Art Hazelwood madame-gargantua 2016
Madame Gargantua, Art Hazelwood, 2016

Au delà de la figure convenue de la croqueuse d’hommes, c’est bien un système de consommation  déréglé et autophage qui est dénoncé : d’où la transposition aisée du Second Empire et des billets de 100 00 francs, à l’Empire Américain et à son billet vert.



 

Bertall 1874 Frontispice La comedie de notre tempsFrontispice pour La comédie de notre temps, Bertall, 1874

Cette femme-enfant montée en grade, que les masques à la ceinture désignent comme la Comédie en personne, examine ses dernières victimes avant de les jeter dans sa malle. Les dîners en ville sont son terrain de chasse (la table avec les liqueurs, le manuel de Civilité). Des oeuvres d’art, des titres de noblesse, des bourses pleines sont ses trophées.



La Courtisane moderne (The Thorny Path)

Thomas Couture, 1873, Philadelphia Museum of Art.

 1873-Thomas_Couture-_The_Thorny_Path-philadelphia-museum-of-Art
Rendu célèbre par sa grande composition sur les Romains de la Décadence, Couture critique ici une autre forme de décadence, éternelle et universelle.


L’attelage

Un phaéton est tiré par quatre mâles captifs représentant différents âges et états de la société :

  • un vieux riche ventripotent mène l’attelage, sa bourse à la main, une couronne de Bacchus  sur la tête ;
  • un jeune fou avec clochette tourne son sublime visage vers l’Idéal,  sans sentir les liens sur son pourpoint ;
  • un jeune poète couronné de lauriers continue d’écrire malgré l’esclavage ;
  • un soldat d’âge mur tire lui-aussi, sans songer à trancher les liens avec sa lame.

Selon le catalogue de l’exposition, ils représentent respectivement la richesse, la jeunesse, la poésie et le courage [1].

Les  regards s’évitent, ne se tournent ni vers l’avant, ni vers la cause unique qui les dirige par derrière : isolés chacun dans sa manie, ils avancent entre les chardons.


Le véhicule

 Une sublime jeune femme tient d’une main la bride, de l’autre le fouet. Les initiales TC, gravées sur le piédestal du faune, placent le peintre sous la même égide. Aiguillonnant les hommes, elle-même est poussée vers l’avant par son destin qui la surveille par derrière : une vieille femme emmitouflée et aigrie, avec pour dernier plaisir la carafe de vin dans le panier.

 

Epineux pour les marionnettes, le chemin l’est tout autant pour celles qui tirent les ficelles.



1873 Pieter Willem Sebes Amusing the baby

Pour amuser bébé (Amusing the baby)
1873, Pieter Willem Sebes, collection privée

De la même époque, cette scène de genre qui se veut touchante cache peut-être un sous-texte  : de même que la lionne donne tôt le goût de la viande à ses petits, la Femme Fin de siècle apprend à sa progéniture que manipuler un Pantin est plus amusant qu’un hochet.

 Image en haute définition : https://www.bonhams.com/auctions/17644/lot/210/


Felix Ehrlich The Art Lover, signed, dated F Ehrlich, 1 9 88

L’amoureux de l’Art
Félix Ehrlich, 1888, Collection privée

Ce tableau très original explore le thème inverse, celui du vieil homme à la poupée.  La lance, la chope de bière et le bras du Cupidon sont cassés : on comprend bien qu’il ne reste pas grand chose de la virilité, des plaisirs et de l’Amour. Seule chauffe la colle sur le petit réchaud. La tête à peine recollée semble prête à apostropher le vieux misogyne,  qui se demande s’il n’aurait pas mieux fait de s’abstenir.

 


Dans les années 1880,  Henry Somm va se spécialiser dans un fétichisme particulier : une Parisienne au profil callipyge ridiculisant diversement un petit homme.

HFA-1881 ca. Henry Somm, The Rights of WomanLes droits de la Femme  

HFB_1879 ca Henry Somm The TightropeLa corde raide

HFC 1880 cc Henry Somm HFD 1880 cc HENRY SOMM Dessin
HFE 1880 cc HENRY SOMM Elegante a l eventailPapillon HFF 1880 cc HENRY SOMM Une jeune femme ayant attrape un homme a la canne a pechePoisson
HFG 1880 cc HENRY SOMM Elegante entouree de soupirantsParisiens

 



1882 Artigue moqueuseMoqueuse,
L.Artigue, 1882
 

1882 (avant) Louis Charles Verwee Jeune femme jouant avec un pantinJeune femme jouant avec un pantin
Louis Charles Verwee, avant 1882

 

 

Tous ces artistes mineurs se contentent d’exploiter paresseusement  le masochisme du thème, sans grandes conséquences.  Pour enfin dégager l’énergie explosive  que Goya et Couture avaient subodoré,  il va falloir la succession de deux grands dynamiteurs fin de siècle  :  Rops d’abord dans les arts graphiques, puis Pierre Louÿs en  littérature.

Références :
[1] « O beauté vénale ! Jadis tu faisais des martyrs et des héros, tu ne fais plus que des martyrs et des laquais. O courtisane dégénérée ! Enfant gâtée de ma portière ! Qu’as-tu fait de la poésie, de la richesse, de la jeunesse et du courage qui te servaient d’escorte autrefois?… Un attelage! «  Gazette des beaux-arts: 1860, Volume 1, p 116

2 Les pantins de Rops

23 avril 2016

Rops est le premier à avoir  compris l’exceptionnel potentiel symbolique et érotique de la Dame au Pantin, qu’il va développer  à quatre reprises, sur une dizaine d’années.

De rares antécédents

A sumptuously dressed lady gestures towards a mid-air battle between winged fools; small injured figures fall from a bird-house like edifice. Woodcut by Tobias Stimmer, 1580.

Une dame et ses fous, Tobias Stimmer, 1580 

On ne sait pas si Rops connaissait cette extraordinaire métaphore aviaire, dans laquelle des fous volants, portant des bourses, sont attirés, dépouillés,  déplumés et désarmés dans la volière de la Belle.


anonyme 1871 published by E.Breyer in Brussels

Il a en revanche peut être vu cette caricature, qui fait partie d’un recueil de 32 planches satiriques sur la guerre franco-prussienne.

  • La Mort rappelle aux vaincus : « Qui s’y frotte s’y pique. »
  • La Folie secoue les hommes du Second Empire, et même le pape perd sa clé.
  • La République coupe les fils : Napoléon III et la reine d’Espagne Isabelle II tombent sur des sacs d’or, autour d’un jeune homme qui doit être Louis, le prince impérial.


Dame au pantin et à l’éventail

Rops, 1873, Musée Rops, Namur

1873 Rops Dame au pantin et a l eventail Musee Rops Namur
D’un regard intense, la Dame fixe le polichinelle qu’elle a sorti de sa boîte, ridicule avec ses membres grêles, ses gros sabots, sa ficelle qui pend, son plumet en berne, sa petite canne filiforme, et sa double excroissance hypertrophiée.



1873 Rops Dame au pantin et a l eventail Musee Rops Namur pantin
Elle préfère tenir son éventail vertical que de tirer sur la ficelle et  ragaillardir ces minuscules virilités. Sa main dégantée et son bracelet d’or disent d’ailleurs que tout contact charnel se paye.


1873 Rops Dame au pantin et a l eventail Musee Rops Namur detail bouc

Le profil de bouc de la table introduit une  transitivité très fin de siècle  :

si l’Homme est le Pantin de la Femme, la Femme est le Pantin du Diable [1].


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La Dame au pantin

Rops, 1877, Musée Rops, Namur

1877 _Rops_-La_Dame_au_pantin Coll Babut du Mares, Namur
Si la première maîtresse laissait planer l’ambiguïté sur sa condition (une bourgeoise qui s’amuse ?), celle-ci proclame fièrement, par son ruban, son décolleté, sa bretelle qui pend et l’absence de gants, sa qualité de professionnelle.

Elle a pleinement conscience de son pouvoir érectile, matérialisé  par son bras gauche levé.  Mais si l’Homme – car le Polichinelle porte maintenant monocle et haut-de-forme – veut grimper au ciel, encore doit-il payer le prix fort : des sous à en remplir une coupe, qui s’échappent de son coeur crevé.



rops-the-falconer-la-fauconniere National Gallery of Art, Washington

La fauconnière (the falconer)
Rops, non daté, National Gallery of Art, Washington

La même main brandit ici un faucon phallique. Nous nous rappelons alors  la pluie de pièces de Danaë et sa  signification séminale.



1877 _Rops_-La_Dame_au_pantin Coll Babut du Mares, Namur ubi mulier
La question « Ubi Mulier ? Où est la femme ? » semble posée par le Sphinx. La réponse est donnée juste au dessus : « C’est une coupe mordue par un Serpent « .

Sur le bas-relief six autres pantins pendus  à leur fil élèvent vers ce réceptacle un regard implorant :

  • le sabreur rêve de le remplir de sang,
  • le politicien de discours,
  • le poète de vers,
  • le financier d’or,
  • le peintre de couleurs.

Mais c’est leur propre squelette qui les attend à droite, comme dans toute Danse Macabre.


1877 _Rops_-La_Dame_au_pantin Coll Babut du Mares, Namur detail faune

L’inscription « Ecce Homo (voici l’Homme) » montre que celui-ci est un bouc, du même bronze que son Maître, le Faune ou le Démon cornu dont le profil supplante celui du Sphinx, figure de Sagesse qui s’efface dans le lointain.

Dans cette planche impitoyable, toutes les figures masculines, le pantin de tissu, ses six collègues de pierre, le bouc aux cornes coupées, et même le faune au bas-ventre échancré sont tous frappés d’Impuissance.



Harry Wilson Watrus The dregs 1915

Les rebuts (the dregs)
Harry Wilson Watrous, 1915, Collection privée

La même idée d’une infériorité radicale de tous les corps de métier – l’ouvrier, le violoniste et le peintre –  ressurgira du temps des Garçonnes, de l’autre côté de l’Atlantique  (voir Profils de femmes modernes)


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La Dame au pantin

Rops, 1883-85, Musée Rops, Namur

1883-85 Rops Dame au Pantin Robe noire

Destinée à illustrer Son Altesse la femme d’Octave Uzanne  :

« Je penche pour la femme qui ouvre le ventre de son pantin duquel tomberait ou plutôt s’échapperait du son, des louis d’or, un coeur sanglant et quelques sonnets » Rops, Lettre à O.Uzanne  [2]

ce troisième opus va rassembler les éléments mis en place dans les deux précédentes versions :

  • le Serpent d’Eden, plus grand et désormais identifié par sa pomme (opus 2) ;
  • la main dégantée au poignet cerclé d’or (opus 1) ;
  • la crevure du Polichinelle, spontanée dans l’opus 2, maintenant expliquée par le poignard que la dame porte à la ceinture.

Ainsi se coalisent les trois puissants thèmes du Péché, de la Masturbation et de la Castration réunis.

La frise des pantins est la même, mais dans l’autre sens : lue de droite à gauche, elle conduit à l’expression de dérision qui les désigne : Ecce homo (opus 2).



1883-85 rops Dame au Pantin Musee Rops Namur

La Dame au pantin
Rops, 1883-85, Musée Rops Namur [3]

Cette quatrième et dernière version remplace la femme du monde en fourreau et dentelles noirs, par une amazone au sein nu, une exécutrice à la robe rouge sang et qui tient le poignard dans sa main : ce n’est plus la Mort, mais la Vie pétante de santé qui sourit à sa victime en toute bonne conscience.



1883-85 rops Dame au Pantin detail frise
La frise est la même, mais se prolonge, au delà du squelette, par la question « Ubi mulier » (opus 2) et un point d’interrogation surmonté d’un nouvel arrivant, un crapaud.


La symbolique du crapaud

Hélène Védrine [4] a établi un rapprochement avec un emblème du début du XVIIème siècle :

1607 Rops influence

Medio tutissimus ibis
Emblème d’après Vaenius, 1607, [5]

Ignorant la devise (Au milieu, tu iras en toute sécurité, Ovide, Métamorphoses, lI, 137), un homme portant un bonnet de fou court vers la Prodigalité qui l’attire avec ses espèces sonnantes, et s’éloigne de l’Avarice avec son sac plein et son crapaud à ses pieds.

« Doit-on penser résoudre ainsi la question que pose l’étrange batracien placé sur la dernière marche de la terrasse ? Serait-ce entre Avarice et Prodigalité que se trouve placé le petit Eros boufon et macabre qui est lui-même la devise ropsienne par excellence ? » [4]


Le crapaud est codifié comme emblème de l’Avarice dans l’édition de 1603 de l’Iconologie de Ripa, mais était connu bien avant :


1558 Rops Avaritia . Pieter van der Heyden after Pieter Bruegel the Elder

L’avarice (détail)
Série des sept péchés capitaux, Pieter Brueghel l’Ancien, 1556-1557

Cliquer pour voir l’oeuvre en entier

Où l’on voit que la pluie d’or est aussi un symbole de l’Avarice, pourvu qu’elle tombe dans un sac.


1883-85 rops Dame au Pantin detail
La similarité de composition avec l’emblème de Vaenius pourrait donc bien n’être qu’une  coïncidence. Le Fou avec sa marotte à tête de Mort se trouve juste sur l’axe du Crime, qui va de la Victime au Serpent, puis au Squelette,  en suivant la chute des pièces d’or dont aucune ne s’échappe de la vasque :

la Femme Fatale n’est qu’Avarice.



1883-85 rops Dame au Pantin detail pantin
Une fraise blanche de Pierrot rajoute un attribut supplémentaire de victime à cet Homme-miniature, qui n’a gardé du polichinelle de départ que la bosse : à savoir sa virilité devenue  infirmité.

H. Védrine fait remarquer  avec pertinence que la découpe de son ventre dessine un N majuscule, ce qui ferait référence à une autre série emblématique de Rops : celle des Naturalia.

La série des Naturalia

Bien que cette série ne comporte pas à proprement parler de pantin, elle constitue clairement une variation et un prolongement du thème de la Femme Fatale brandissant une miniature.

Ad majorem diaboli gloriam

(à la plus grande gloire du Diable)

Rops, dessin, vers 1875

01 1875 ca Rops-Naturalia ad majorem diaboli gloriam
Le comble de la nudité, le squelette, révèle aussi la réalité du sexe féminin : à la fois vulve et ceinture de chasteté, de même forme que le masque de bouc écorné qui dans cette série remplace le Pantin.

L’obscénité ici procède par assimilation graphique (sexe=cadenas=masque), par inversion (en détournant la devise des Jésuites) et par passage à la limite, (en poussant l’effeuillage jusqu’à l’os).


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L’Humanité

Diaboli Virtus in Lombis,  Saint Augustin
Rops, vers 1875

02 1875 ca Rops Humanite Diaboli Virtus in Lombis St Aug. (Etude pour Naturalia) Musee Rops
La citation : « La force du Diable est dans les reins » est en fait de Saint Jérôme  ( Contra Jorimen, 2, 1. 2) mais  Rops met couramment les Pères de l’Eglise dans le même sac. Les trois têtes de mort, de singe, et de Beethoven prouvent que toute l’Evolution ne peut rien  contre la vérité des lombes. La Femme est une décapitatrice innocente, puisque pour elle tous les visages  d’homme portent le même masque : celui du Diable.


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Diaboli virtus in lumbis est

Rops, 1888

1888 Rops_DiaboliVirtusInLumbis
Rops reprendra la même citation dix plus tard, appuyée par une métaphore anatomique différente : après le pubis diabolique, voici le pelvis entomologique.

Rops pervertit ici la vielle métaphore (voir Le crâne et le papillon) en rajoutant, à titre de transgression complémentaire, la tête de Saint Jean Baptiste brandie par cette Cupidonne fessue.


sb-lineNaturalia non sunt turpia

Rops, pointe sèche, vers 1875

03 1875 ca rops-Naturalia non sunt turpia coll priv Moliere

Cette fois, la devise latine, « Les parties naturelles ne sont pas honteuses », est attribuée à Saint Jérôme (tout aussi faussement).

Pour faite bonne mesure en pédantisme souriant, Molière est aussi mis à contribution  :

« Avec la permission de Monsieur, je vous invite à venir voir l’un de ces jours pour vous divertir de la dissection d’une femme, sur quoi je dois raisonner. »  Molière, Le Malade imaginaire, II, 5

Le sang menstruel apporte un démenti flagrant à ce que prétend la devise. Rops est coutumier de cette contradiction entre texte et image :

« Ce masque-sexe flamboyant est visuellement confondu au mot qui le désigne « jetant par la bouche des flammes qui se mêlent au mot Naturalia« … Alors que le texte brandi comme par une Gloire érotique dit, conformément au motto inscrit à ses côtés, que la sexualité n’est pas honteuse … le sexe greffé sur le bassin squelettique apporte un déni immédiat et macabre… De disjonction en déni, l’image ne finit que par dire l’Inquiétant et c’est le mode de composition de cet Umheimliche qui prime plutôt qu’une signification stable forcément rassurante. » [4] p 100


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« J’appelle un chat un chat », Boileau

Rops, vers 1875

04 1875 ca Rops Naturalia Boileau Musee Felicien Rops, Namur

 

Cette fois la citation est exacte (Nicolas Boileau, Première Satire, 1666).

Le masque pubien a effectivement été retouché dans le sens d’une similitude féline.

« Dans cette savante mise en scène, les naturalia qui sont censés ne pas être turpia se révèlent précisément tels. En faisant semblant de racheter les parties naturelles, la Décadence brandit le spectre de la lubricité et récuse la chair en y logeant le monstre. Rops s’acharnant sur le nu moderne le tire vers l’allégorie satanique d’autant que, sur certaines épreuves, une note au crayon, attribuée à son alter ego, Jacques Pontaury, accuse l’appartenance fantastique de la figure:

« Et souventes fois, à Paques-Flories qui est saison de rut, esbaudoyements et accollements de Nature, apparaît la femelle de icelluy Satan, mi partie en gourgandine, et mi partie en esquerlette. Sans camise, avec testins tout nuds; et aussy faisant veoir son sexe, lequel a visaige de Diable avec coarnes de bouc. Et vient de nuit tenant en sa dextre, un autre sexe, comme celui qui est à son pubice, pour faire cheoir en fornication, les jouvenceaux qui sont chauds en leurs coillons, lesquels, voyant ce sexe se débraguettent et deviennent ainsy en servage d’Enfer pour cette estrange er Vénérienne Gouge. – Jacques Pontaury (Gauderies, Contes sallés et pasquaies du Païs Nameurois) »

Evanghélia Stead, [6]


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Naturalia non sunt turpia, Baudelaire, Sénèque l’Ancien

Rops, vers 1875

05 1875 ca Rops Naturalia Baudelaire Seneque Bibliotheque de l'Universite de Varsovie

 

La citation de Baudelaire

« Hélas ! les vices de l’homme, si pleins d’horreur qu’on les suppose, contiennent la preuve (quand ce ne serait que leur infinie expansion) de son goût de l’infini » Baudelaire, les Paradis artificiels


« Élévation vers l’idéal, c’est bien ce que semble représenter cette femme qui brandit un sexe comme un fanal, en même temps que Rops représente conjointement, selon une dialectique proprement baudelairienne, ce qui la retient ancrée à la matière et à l’inéluctable fatalité de la mort. » H. Védrine [7]


La citation de Sénèque

La seconde citation est lapidaire : « dux malorum femina » Elle est extraite du Phèdre de Sénèque :

« Sed dux malorum femina: haec scelerum artifex (Les femmes sont la source de tous les maux; ce sont elles qui trament les forfaits) »


« On perçoit bien à quel point elle semble contredire le sens du titre de l’œuvre. La succession et le montage de citations mettent ainsi en évidence le propre travail d’inversion de l’image qui, autour du pôle représenté par la diagonale de la jupe tendue, oppose un sexe glorieux à un sexe mortel.«  H. Védrine [7]


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1870 JULES_LEFEBVRE La VeriteLa Vérité
Jules Lefebvre, 1870
 

1870 ca Bartholdy Esquisse pour la statue de la liberte Brooklin Museum

 

 

 

 

 

Esquisse pour la statue de la Liberté
Vers 1870, Bartholdy, Brooklin Museum

 

Dans ces deux robustes allégories de l’époque :

  • la Vérité brandit son miroir lumineux de la dextre, en tenant de la senestre la corde du puits dont elle est sortie ;
  • la Liberté brandit sa torche d’une main et tient une chaîne brisée de l’autre.


01 1875 ca Rops-Naturalia ad majorem diaboli gloriam Miss Marylin Liberty

Avec sa femme-squelette tenant d’une main un masque enflammé, de l’autre un bout de liquette, Rops s’est évidemment amusé à  pasticher et transgresser ces deux nobles modèles… comme d’autres le feront plus tard.


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Holocauste

Rops, 1895

1895 Rops Holocauste

L’holocauste est celui des deux coeurs embrasés qui se consument en forniquant. Au-dessus, la Femme écarte ses linges comme des nymphes. Centrée sur elle, la devise proclame que les parties intimes ne sont pas honteuses.



1895 Rops Holocauste faune
Centrée sur le Faune rigolard, la devise dit le contraire.

« ..aux côtés du thème de la révélation de la nudité, la planche affiche son pastiche. Un petit faune, tombé à la renverse, ouvre impudemment les jambes pour montrer du doigt… une feuille de vigne. Couronné de pampres, rieur, brandissant le thyrse, il est le double grotesque de la femme nue et sacralisée. » Evanghélia Stead, [6]


Références :
[1] « L’homme pantin de la femme, la femme pantin du diable, sont deux de ses thèmes favoris, d’une grande portée psychologique, rendus avec une intensité plus excessive que ce11e de Baudelaire, avec lequel il a des rapports très grands. Imaginez que le poète des Fleurs du Mal ait ecrit avec lignes, et vous aurez quelque idée de Rops, le seul artiste assez mystique pour pourtraicter la perversité moderne » Joséphin Péladan, L’Artiste, Mai 1883.
[4] Anamorphoses décadentes: l’art de la défiguration, 1880-1914 : études offertes à Jean de Palacio, Presses Paris Sorbonne, 2002, Iconologie, Etude d’Hélène Védrine, p 107
[5] Gravure de Vaenius tirée de Emblems of the Low Countries: A Book Historical Perspective Par Marleen van der Weij, Librairie Droz, 2003, p36
[6] Le monstre, le singe et le fœtus: tératogonie et Décadence dans l’Europe fin-de-siècle Evanghélia Stead, p 112, Droz, 2004

[7] Le marginal et le liminal : quelques pratiques d’annotations littéraires et visuelles chez Félicien Rops et James Ensor, Hélène Vedrine https://textyles.revues.org/1246#ftn16

3.1 Après Pierre Louÿs : au bout d’un fil

23 avril 2016

Le roman de Pierre Louys parait en 1898. Bien que Goya et Rops aient influencé le choix du titre, il ne s’agit d’un pantin qu’au figuré, et aucune illustration du livre n’en montre un directement.

Néanmoins, cette parution va donner de la chair et un second souffle à ce qui n’était jusqu’alors qu’un sujet quelque peu théorique : cas d’école où un événement purement littéraire va produire un effet de cristallisation graphique, et légitimer pour le grand public un thème jusqu’alors sulfureux et réservé aux happy fews.

Devenu à la mode, le Pantin XXème siècle va épouser toutes les péripéties de l’époque et se décliner à toutes les sauces : à fil, à main, réduit à une poupée voire simplement à un masque.



Au bout du fil

La manipulation sans contact est le geste qui met le mieux en valeur la supériorité de la Femme : cette haute teneur en masochisme en a fait, et de loin, la formule la plus répandue.



Leon Roze 1900 ill pour Marguerite Bellanger Les amours de Napoleon III
Léon Roze, couverture pour « Les amours de Napoleon III », par Marguerite Bellanger, 1900

La toute nouvelle iconographie se reflète dans cette métaphore de la République triomphante de l’Autocratie.

Mais c’est surtout dans le domaine léger qu’elle va faire florès.



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1900 carte postale

Carte postale 1900

Dans une réminiscence de la pesée des âmes, cette cocotte rigolote sauve le bel homme svelte et condamne le vieux ventripotent.


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1900 cc carte postale cakewalk intime

Cake walk intime
Série de six cartes postale 1900

Les pas de la danse à la mode servent de prétexte à des nudités agrémentées d’accessoires variés, dont le Pantin.



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Advertisement for a Gentleman's Evening at the Vienna Opera by Heinrich Lefler

Publicité pour une soirée d’Hommes à l’Opéra de Vienne,
Heinrich Lefler, 1901

Autodérision parfaitement assumée par les membres du Königliche et Kaiserliche Opera : la vie n’est qu’un théâtre de marionnettes aux mains de la Femme Fatale.



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Raphael Kirschner 1La rencontre Raphael Kirschner 2La présentation
Raphael Kirschner 3La déclaration Raphael Kirschner 4L’invitation
Raphael Kirschner 5La danse Raphael Kirschner 6La promenades

 Série de six cartes postales, Raphael Kirschner, 1902

Toutes les phases de la parade amoureuse sont délicieusement manipulées par l’Eternel Féminin.

Notons que c’est dans la Déclaration seulement que le fil de la dame est relâché : comme si la marionnettiste voulait, à ce moment seulement, laisser le choix à sa créature.

Pour toutes les séries de cartes postales de Kirschner, voir le précieux site :  http://www.ak190x.de/kirchnerneu.htm


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Poster for Opera by Francois and Victor ClericeAffiche pour l’Opéra : Le Chevalier d’Eon
Francois and Victor Clerice, 1908
AB 1916 L Clauss La femme et le pantin Librairie Charpentier et Fasquelle,Illustration pour La femme et le pantin
L.Clauss, 1916, Librairie Charpentier et Fasquelle

Deux trouvailles d’illustrateurs ingénieux :

  • à gauche l‘ombre invertie du marionnettiste ;
  • à droite la femme de chair piétinant l’ombre du pantin, au centre de sa toile d’araignée.



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AA 1909 Angel Zarraga, La femme et le pantinLa femme et le pantin
Angel Zarraga, 1909, Museo Andrés Blaisten, Mexico
AA 1914 Pierrot malade fderico beltran massesLe premier-né (El primogenito)
Federico Beltran Masses, 1914

Le peintre mexicain Zarraga a peint ce tableau juste après un retour aux sources en Espagne, dans l’atelier de Zuloaga : il s’agit explicitement d’une illustration non pas du roman, mais du titre de Pierre Louÿs. La Femme y apparaît debout et avec toutes les armes de son sexe (la nudité et les bijoux) tandis que le Pantin, mi Pierrot mi clown blanc, est affublé de dentelles et d’une robe fleurie.

Dans le « Premier-Né » de Federico Beltran Masses, Pierrot et Colombine deviennent un couple transgressif où un vieil enfant prolongé, aux membres interminables engoncés dans des linges blancs, anguleux et maladif, fait ressortir d’autant les courbes voluptueuses de sa « mère ».

Revenu en Espagne où il est né, sulfureux ou souffreteux, le Pantin de Louÿs ne trouble en aucun cas la placidité de la Nudité glorieuse à laquelle il est confronté.



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Marionnettes siciliennes

1903 Sargent-MarionettesMarionnettes (derrière le rideau)
Sargent, 1903, collection privée.
1912 De Maria Berghez Ettore, Rinaldo e Armida Galleria d'Arte Moderna, PalermoRenaud et Armide
Ettore De Maria Berghez, 1912,  Galleria d’Arte Moderna, Palerme

Le peintre américain s’intéresse à la technique exotique des baguettes, mais la portée de la composition va bien au delà, avec ces trois jeunes gens en blanc manipulant les passions humaines au profit de deux adultes en noir (le chef-marionnettiste et le spectateur). Sargent a conservé ce tableau toute sa vie et l’a légué à ses descendants.

Le peintre sicilien rappelle que la figure de la Femme qui manipule le Héros existe depuis bien longtemps dans la littérature nationale (La Jérusalem délivrée, du Tasse).


Sophia Loren at the Venice Film Festival in 1958
Sophia Loren, Festival du Film de Venise, 1958



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Edmund_Joseph_Sullivan_-Le Roi S'Amuse, 1910. Illustration to 'The French Revolution A History' by Thomas CarlyleLe Roi s’amuse (Illustration pour ‘The French Revolution A History’ par Thomas Carlyle
Edmund Joseph Sullivan, 1910

C’est ici Marie-Antoinette qui incarne une opulente marionnettiste.



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1910 ca Carte postaleCarte postale, 1910 1910 ca von BayrosFranz von Bayros, 1910

En version populaire ou en version raffinée, le thème est désormais solidement ancré.


1910-12-09 Regina Badet au theatre Antoine

Régina Badet au Théâtre Antoine, 1910


Pieter van der Hem Pulling the Strings 1911

Tirer les ficelles
Pieter van der Hem, 1911

Il permet de tirer les ficelles d’un masochisme et d’un lesbianisme discrets.


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1913 Georges LepapeLa Femme et les Pantins
Georges Lepape, 1913
1913 HerouardLa Femme et le Pantin
Herouard, 1913

En style commedia dell’arte, le Moche offre vainement un bouquet somptueux quand le Beau peut se contenter d’une rose.

En style Parisien Polisson, c’est l’Homme de la Rue qui est préféré au Peintre, au Poète, au Juge, à l’Officier, au Député, au Monarque et au Moine, à l’issue d’un exercice d’élasticité comparée.

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1914 Nice Mossa1914 1915 Nice Mossa1915

Affiches pour le Carnaval de Nice, Gustav-Adolf Mossa

En 1915, la Ville de Nice personnifiée fait danser au son de ses grelots la population ficelée. Par contraste avec le joyeux Pantagruel affichiste de l’année précédente, cette image ambigüe, qui se rattache aux géantes fatales de Mossa, ne peut manquer d’évoquer la folie régnant sur le monde.

Sur l’état d’esprit de l’artiste à cette époque, voir Diane ZORZI, L’œuvre de Gustav-Adolf Mossa pendant la Grande Guerre 1915-1918, https://hicsa.univ-paris1.fr/documents/file/9-Zorzi-Mossa.pdf


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Et deux calamités arrivèrent : les Suffragettes et la Guerre.


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1916 Vote Suffragettes Postcard

« Je fais s’asseoir les petits garçons »
I’m making the boys sit up

Carte Postale en faveur des Suffragettes, 1916

Quadruple sens pour cette petite carte postale. Les garçons n’ont plus qu’à s’asseoir :

  • pour assister au spectacle ;
  • époustouflés par la marionnettiste ;
  • parce que ce sont eux les pantins ;
  • une fois les femmes élues.


1918 herouardmarionnettes-parisiennes-puppets-hprints-comDeux héros qui se vouent à tous les seins
Hérouard, La Vie Parisienne, 1918
1919-umberto-brunelleschi-marionette-puppet-harlequin-art-deco-style-hprints-comE finita la tragedia… la comédie recommence
Umberto Brunelleschi, 1919


 

Julien Mandel Alice Prin (Kiki de Montparnasse) 1920 ca Studio Armand Noyer (AN) A1 NUDE AND DOLL Julien Mandel Alice Prin (Kiki de Montparnasse) 1920 ca Studio Armand Noyer (AN) A3
Julien Mandel Alice Prin (Kiki de Montparnasse) 1920 ca Studio Armand Noyer (AN) A4 Julien Mandel Alice Prin (Kiki de Montparnasse) 1920 ca Studio Armand Noyer (AN) A5 Julien Mandel Alice Prin (Kiki de Montparnasse) 1920 ca Studio Armand Noyer (AN) A5a

Julien Mandel Alice Prin (Kiki de Montparnasse) 1920 ca Studio Armand Noyer (AN) A7

Vers 1920, Julien Mandel, 1920, Studio Armand Noyer (AN)

Cette modèle qui est sans doute Alice Prin, la bientôt célèbre Kiki de Montparnasse, relance le thème sulfureux au tout début des années folles.



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Max Bruning 1920 ca Les poupees Port folio Map. F. Schemann, LeipzigLes poupées Max Bruning 1920 ca Opium Port folio Map. F. Schemann, LeipzigOpium

Max Brüning, vers 1920 Port folio F. Schemann, Leipzig

Sur les douze gravures de la série, Max Brüning en consacre deux à des marionnettes, illustrant deux extrêmes de la condition masculine :

  • dans la version cosmopolite, la natte sert de laisse au chinois féminisé, supplanté par un Pierrot lubrique ;
  • dans la version destroy, la pipe démesurée explique l’effroi de la fille.


Max Bruning Ex libris Dr Werner WolffEx libris Dr Werner Wolff, Max Brüning

Dans un contrejour spectaculaire, la marionnettiste piétine la Liberté et la Tragédie, en manipulant la baguette de la femme qui se croit maîtresse.


1922_vald_es_polichinelleDécidement, Polichinelle sera toujours un mauvais farceur
Vald’es, 1922

Dans cette version parisienne, au contraire, la marionnette réussit ce qui est impossible au passant : voir ce que cache la robe.


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Harry Clarke 1922 The Fairy Tales of Charles Perrault
Harry Clarke, 1922, The Fairy Tales of Charles Perrault, p20 et 21

Ces deux bas de page élégants et subtils sont liées par la même idée d’une Fatalité qui tire les ficelles :

  • à droite est illustrée non pas la fable, mais la moralité du Petit Chaperon Rouge : à savoir que toutes sortes de loups « suivent les jeunes Demoiselles, jusque dans les maisons, jusque dans les ruelles «  ;
  • à gauche, l’introduction de Thomas Bodkin se clôt par une Fée avec sa baguette, dont on ne sait si elle va unir ou dissocier le couple.

Pour accéder au livre : https://archive.org/details/fairytalesofchar00perr/page/20/


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1923-rene-vincent-le-sexe-fort-puppet-marionette-hprints-comLe sexe fort
René Vincent, 1923, La Vie Parisienne
leo-fontan-September 1923-eros magazineLéo Fontan, Septembre 1923, Eros magazine

Mais les Fondamentaux reviennent la plupart du temps : l’homme des Années Folles aime se voir en chiffe molle, inerte ou suppliante.


Georg Erler Georg Erler 1925 ca exlibris Emil Netter Ex Libris Emil Netter, vers 1925

Georg Erler 

La Guerre a définitivement remis à leur place dérisoire les hommes à couvre-chefs qui pensaient régenter le monde.


Michel Fingesten exlibris emil netter

Ex Libris Emil Netter, Michel Fingesten 

Emil Netter était visiblement un amateur du thème de la femme-araignée, qui attrape sa proie au bout d’un fil.


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1926 Femme Pantin1926, La Femme et le Pantin 1928 LA FEMME ET LE PANTIN Conchita Montenegro Raymond Destac1928, affiche suédoise pour le film  de Jacques de Baroncelli, LA FEMME ET LE PANTIN, avec Conchita Montenegro et Raymond Destac

1927 Jean Gouweloos La Femme et le Pantin Musee Charlier, Bruxelles

La Femme et le Pantin
Jean Gouweloos, 1927, Musée Charlier, Bruxelles

Petites ou grandes, en chemise ou nues, en dessin ou en peinture, verticalement ou horizontalement, les Femmes s’amusent avec leur Pantin, en extension ou flagada.


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1931 ou 36 Pierre Dionisi La femme et le Pantin ParisLa femme et le Pantin
Pierre Dionisi, 1931 ou 36
1933 norman-lindsay-puppet-danceLa danse du Pantin
Norman Lindsay, 1933
1936-georges-leonnec-la-femme-et-le-pantin-sexy-looking-girl-topless-puppet-hprints-comLa femme et le Pantin
Georges Leonnec, LaVie Parisienne, 1936

Sorti de son pot à volonté, dégonflé et regonflé à loisir, le Pantin revêt  un caractère de plus en plus scabreux.


1934 Les fleurs du mal. ed Le Vasseur Manuel Orazi frontispice gallicaFrontispice  1934 Les fleurs du mal. ed Le Vasseur Manuel Orazi Hymne a la Beaute p 41Hymne a la Beauté, p 41

Illustrations de Manuel Orazi  pour « Les fleurs du mal », éditions Le Vasseur, 1934, gallica  



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l-ange-bleu-couverture_revue_1930L’Ange Bleu
Couverture de la revue Das neue Film Programm, 1930
https://artifexinopere.com/wp-content/uploads/2016/04/l-ange-bleu-1930.jpgL’Ange Bleu
Affiche française, 1930

C’est seulement en 1935 que Von Stroheim mettra à l’écran La femme et le Pantin (The Devil Is a Woman) avec  Marlène Dietrich. Mais dès 1930 les deux avaient inauguré leur collaboration fracassante avec un thème tout aussi sulfureux, bien qu’il n’y a pas à proprement parler de pantin au bout d’un fil dans l’« Ange Bleu ». La richesse de l’histoire tient à ce qu’elle oscille entre deux thèmes contradictoires :

  • à gauche, la vision « Doctor Unrat » : celle de la femme-poupée qu’il sera facile de ployer, à l’image des branches de lunette ;
  • à droite, la réalité : celle de l’homme-clown manipulé de toutes parts.

Si Unrat avait fixé son attention sur le haut-de-forme plutôt que sur les bas, peut-être aurait-il évité de finir la tête enfoncée dans ce faux-col vaginal :

du danger d’interchanger les symboles sexuels !



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1934-03-SpicyStories

Spicy Stories
Edition de Mars 1934

En passant l’Atlantique, le thème va revenir à sa simplicité originale, et s’adapter à l’imaginaire local. Le Pantin n’est plus un looser désigné, mais un homme qui a les moyens de rendre le match intéressant : le Millionnaire avec son haut-de-forme, insigne de puissance et de virilité.


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1940 ca Doll dance

Danse de poupées
Vers 1940

Dans ce numéro burlesque de danse en miroir, Rene doit suivre les mouvements d’Arlette la marionnette, bien sûr sans la regarder. On se demande ce qui est le plus apprécié dans ce spectacle : la perfection de la coordination, la plastique de la chair exaltée par celle du bois, ou bien le vieux fantasme de plier à sa volonté une Géante, par la seule force de la pensée.



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1945 ca Elvgren Jack In BoxJack In The Box
Pinup de Gil Elvgren, vers 1945
1949 (March ) elvgren-theyre_easy_to_handle when you know how« Ils sont faciles à mener quand on sait comment »
« they are easy to handle when you know how »
Pinup de Gil Elvgren, mars 1949

Même monté sur ressort, portant une moustache irrésistible et coiffé de son symbole phallique substitut de celui de Pinocchio, le Millionnaire n’est pas de taille à impressionner la pinup.

Lorsqu’il est à fil, noter que c’est la main droite qui manipule avec agilité les parties supérieures, tandis que la main gauche suffit à agiter la canne et les guibolles.



sb-line1950 ca Danse macabre

Danse macabre
Vers 1950

Même technique chez cette blonde et cette brune, spécialistes du dépouillement jusqu’à l’os.

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PETER DRIBEN - Getting Gertie's Girdle - Feb 1953 Flirt magazineGetting Gertie’s Girdle
Peter Driben, Février 1953, Flirt magazine
Bill Randall May 1953Bill Randall, calendrier Mai 1953

La pin-up de gauche expose, un par jambe et par sein, les deux  qualités masculines nécessaires pour la satisfaire : l’argent et le muscle.

Celle de droite fait danser les hommes, jusqu’à ce qu’elle se retrouve prise à son propre piège.


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1953 Jantzen

Et vous pouvez vous pencher, 1953, Publicité pour les gaines Jantzen

Preuve de l’efficacité de la gaine, un mannequin de bois prouve à ses deux marionnettes humaines, la femme en tenue de gala et celle en tenue d’extérieur, que leur taille est aussi souple que la sienne.


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1956 Mahlon Blaine garden-of-eden

Le Jardin d’Eden
Mahlon Blaine, 1956, Collection privée

Dans cette oeuvre dédicacée au magicien Dunninger, Blaine nous montre un Diable marionnettiste, aux seins de femme et au collier de serpent, rejouant de ses deux mains griffues la scène de la Pomme, tandis que l’Ange vengeur attend de rentrer en scène.


1956 Mahlon Blaine garden-of-eden detail

Pour un illustrateur réputé déjanté (voir sa biographie sur http://grapefruitmoongallery.com/9449) , une logique subtile est à l’oeuvre : pour la saisir, il suffit de suivre les dix fils.

1956 Mahlon Blaine garden-of-eden fils

  • aucun ne mène à la figurine du serpent : le diable ne se manipule pas lui-même ;
  • cinq fils partant de sa main droite (en bleu) animent Eve : ses deux pieds, son torse, sa tête et sa main gauche qui tend la pomme à Adam ;
  • un fil supplémentaire partant de sa main gauche (en jaune) se dirige, sans l’atteindre, vers la main droite d’Eve ; celle-ci fait le geste traditionnel de la réception de la Parole, paume à l’avant, face à la tête du serpent ;
  • les quatre autres fils partant de la main gauche animent Adam : ses deux pieds, sa tête et sa main droite, qui enlace la hanche d’Eve.

Autrement dit : la pomme est manipulée par le Diable : mais aucun fil n’oblige Eve à écouter le Serpent, aucun n’oblige Adam à accepter la pomme.

Même chez les Pantins, il n’y a Péché que s’il y a Liberté.



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1963 Amorella Rhodia

Les tissus Amorella 1963 rayonnent dans le monde entier, 1963, publicité pour les tissus Rhodia

Les fils évoquent astucieusement et le produit (la rayonne), et le slogan.



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She was eager to be taught each new step of the strange illicit dance of desire Midwood-F371-1964
 
Pretty puppett
Editions Midwood, N° F371, 1964 

Comme souvent, la brune sulfureuse initie la bonde candide, « impatiente d’apprendre chaque nouvelle étape de l’étrange et illicite danse du désir ».


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1984 Boris Vallejo_

1984, Boris Vallejo

Manipulation à double étage.


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Femme et marionnette

Femme et marionnette
Illustrateur inconnu, date inconnue

Au nombre de fils, cette Cruella est gagnante, si on oppose la densité de sa chevelure et la rigueur de ses résilles bien tendues, aux six ficelles lâches du pantin qu’elle envoie balader du bout d’un ongle.


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2008 Fiona StephensonFiona Stephenson, 2009
2009 Fiona StephensonStick 'em UpFiona Stephenson, 2008

En soubrette pour Milliardaire en chapeau claque, ou en cowgirl pour Latino en sombrero : même manière de ridiculiser les machos.


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sally moore playtimePlaytime
Sally Moore 
Svetlana Mishchenko-Sapsay Pouvoir 2013Pouvoir  Svetlana  Mishchenko-Sapsay, 2013

Brune au blonde, femme-enfant ou femme fatale : deux exemples récents d’autoportraits aux marionnettes.



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2010 ca Keith GarveyKeith Garvey
2010
michael-oswald play with mePlay with me
Michael Oswald

Deux figures de style pour pousser le thème aux limites :

  • le réductionnisme : le Pantin comme pantin ;
  • l’auto-référence : le Pantin comme son propre Marionnettiste.


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michael-cheval

Evolution
Michael Cheval, vers 2013

Michael Cheval Evolution 2015

Evolution
Michael Cheval, vers 2015

Enfin, la mise en abyme (voir L’effet Droste).

A noter la hiérarchie décroissante (en taille et en sophistication) :

  • la Marionnettiste en chair, en os et en bicorne,
  • le Fou en tissu et chapeau à grelots,
  • le Pantin en bois et chapeau à pompon,
  • le bout de tissu pendu à un seul fil, qui constitue la réduction ultime de la Marionnette.

Voici ce que dit l’artiste de ce tableau :

« Selon la théorie de Darwin, tout évolue du primitif au complexe. En fait, tout dans notre vie est  sujet à cette loi. Les relations sociales et personnelles croissent en développant des complications. Les systèmes plus développés contrôlent le système primitif. Cela peut être illustré par l’exemple du théâtre de marionnettes, où un humain contrôle une belle poupée avec une tête de porcelaine qui contrôle à son tour une poupée en bois, qui gère une poupée de chiffon qui ressemble à un homme. Ne semble-t-il pas la même chose dans notre société ? « 

https://www.parkwestgallery.com/6-michael-cheval-artworks-explained-by-the-artist/36934

Dans cet enchaînement de causes, chacune ne maîtrise qu’une cause qui lui est inférieure en terme de degrés de liberté : mais qui, en haut de la chaîne, manipule la Marionnettiste ? Ne serait-ce pas cet arbre dangereux (qui semble un nid de lianes rembobinées sur elles-mêmes ) ou ce ciel qui s’obscurcit jusqu’à a complète opacité  ?


Will Wilson Pulling-Strings-1994

Pulling Strings
Will Wilson, 1994

Ici tout pend au bout d’un fil : les astres dorés, les grelots, les mains… et ce que le manipulateur  manipulé manipule.


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Alphonse Inoue Exlibris Alphonse Inoue Exlibris 1
Alphonse Inoue Exlibris 4 Alphonse Inoue Exlibris 3

Alphonse Inoue est un graphiste japonais contemporain, qui renoue avec la formule des Ex Libris, ces sortes de Vanités orgueilleuses, à usage privé mais à vocation universelle, où les jeunes filles et les squelettes ont toujours fait bon ménage.


En politique

Où la domination à dénoncer n’est plus celle de la Femme Fatale, mais de ceux qui tirent les ficelles.

JS Pughe The EuroPean concert Puck 5 mai 1897The European concert, JS Pughe, Puck, 5 mai 1897

Vu d’Amérique, c’est le tsar qui dirige l’orchestre des nations européennes.


Joseph Keppler The living issue Puck 6 juin 1900

Difficile de rester vivant (The living issue), Puck, 6 juin 1900

Joseph Keppler His First War Hero Puck 1er janvier 1901 Guillaume II Waldersee

Son premier héros de guerre (His First War Hero), Puck, 1er janvier 1901

Joseph Keppler

Dans ces deux caricatures, Joseph Keppler utilise la même composition pour dévaloriser sa cible :

  • Bryan, candidat battu d’avance à la présidentielle, fait semblant de bouger encore ;
  • le maréchal Waldersee, envoyé par Guillaume II pour mater la révolte des Boxers, n’est qu’un pantin.


Les paroles et les actes Achille Lemot dans Le Pelerin (1909)Les paroles et les actes, Achille Lemot dans Le Pelerin (1909)

Clémenceau est ici dénoncé à la fois :

  • comme marionnettiste, agitant les épouvantails du cléricalisme et de la démission ;
  • comme pantin de son ambition, des Juifs, des Francs-Maçons, des Socialistes et des Anglais.


Louis Morinet 1915 Les marionnettes du Pantin
Les marionnettes du Pantin, Louis Morinet, 1915

Durant la guerre, Guillaume II deviendra à son tour un pantin à découper qui manipule ses marionnettes (le sultan, l’empereur d’Autriche, le roi de Bulgarie).


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Caricature de Der wahre Jacob. Nr. 514. 1906

Caricature tirée de  la revue anticléricale « Der wahre Jacob »,  Nr. 514. 1906

Dans la grande tradition des danses macabres, cette Mort marionnettiste illustrait la charge  ci-dessous :

Les tambours vous entourent
Tant que vous avez des paillettes
Vous qui êtes comme des jouets
Dans la main du Destin géant
Vous, robe, couronne, ruban –
Profitez bien de votre temps!
Rappelez-vous, une fois que la marée tourne,
Le bateau du bonheur a une voie d’eau,
Le géant est fatigué de son jouet
Et vous jette dans la boue.
Tant que la petite lampe est allumée –
Une fois que le grand coup de balai approche,
Votre danse arrive à sa fin !
Drum tummelt euch im Flitterstaat,
Die ihr ein Spielzeug in der Hand
Des Riesen Schicksal seid —
Ihr, Kutte, Kron’ und Ordensband —
Genießet eure Zeit!
Bedenkt: einst wendet sich das Blatt,
Das Glücksschiff kriegt ein Leck,
Der Riese hat sein Spielzeug satt
Und wirft euch in den Dreck.
So lang das Lämpchen brennt —
Wenn einst der große Kehraus naht,
Ist euer Tanz zu End’!

Origine : http://www.payer.de/religionskritik/karikaturen10.htm


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Alberto Martini 1916 Danza macabra Europea 2 Atto della danza, N°2 1er acte de la danse macabre européenne

Alberto Martini 1916 Danza macabra Europea 51 Le pantin bocheN°51 Le pantin boche (Constantin Ier de Grèce)

 Alberto Martini, 1915, série de cartes postales : La Danza macabra europea

Deux images de cette série violemment anti-germanique montrent le Mort tirant les ficelles des têtes couronnées de la Triplice.


Alberto Martini 1916 Danza macabra Europea 27 Le militarisme allemand et le pantin N°27 Le militarisme allemand et le pantin

Alberto Martini 1916 Danza macabra Europea 21 La purification de l'armee prussienneN° 21 La purification de l’armée prussienne

Guillaume II y reçoit un traitement de faveur, en pantin ou en soudard efféminé (l’affaire Harden-Eulenburg est un scandale d’homosexualité au sein de l’armée allemande en 1907).

Pour l’intégralité des trois premières séries, voir http://vnicbibhbr01.cloudapp.net/EXPLOITATION/la-danza-macabra-europea-1915.aspx.


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La femme et le pantin, ou Marianne et l’électeur
Jack Abeille, 1924, Le Sourire

Affiche anticommuniste France 1936Affiche anticommuniste, France, 1936

Affiche de l'exposition antimaconnique de Belgrade, 1941Les juifs tirent les ficelles. Lesquelles et comment ? Toutes les réponses à l’exposition  antimaçonnique . Belgrade, 1941

John Heartfield, AIZ, August 10, 1933 L'outil dans les mains de Dieu Le jouet dans celles de ThyssenL’outil dans les mains de Dieu ?
Le jouet dans celles de Thyssen !
Montage antinazi de John Heartfield, AIZ, August 10, 1933

soviet-antireligious-posterAffiche soviétique antireligieuse, 1936

Pope, prêcheur de secte, mollah, rabbin – tous prêchent la “doctrine”, qui est étrangère au communisme. Ne soyez pas trompés – libérez-vous de la drogue de la religion !

3.2 Guignols, poupées, masques

23 avril 2016

Guignols

Rarement la Femme Fatale lâche ses fils et fourre directement sa patte dans la gaine : contact direct qui annihile la domination distinguée et fait de la Marionnettiste la complice, plutôt que la maîtresse de sa Chose.



Exposition de Haute Couture Liege 1907 Salle Du Continental

Exposition de Haute Couture, Liège, 1907

La marionnette est vêtue dans le même style que l’élégante, mais pas identiquement : manière de dire que la Haute Couture satisfait à la fois le désir de suivre la mode et celui de rester unique.



1904 Victor Mignot La Femme au Pantin

La Femme au Pantin
Victor Mignot, 1904

A en croire la petite Tour Eiffel qui clipse  le rideau, cette lithographie embarrassée doit vouloir représenter une Parisienne mettant en extension les membres supérieurs d’un vieux Beau. L’air furibard  de la marionnette s’oppose à toute interprétation extatique. A moins qu’il ne faille comprendre que, justement, elle se plaint de ne pouvoir dresser que les bras.



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1911 Leymarie La femme et le Pantin

La femme et le Pantin
Leymarie, Salon de 1911

Ici encore, l’artiste a du mal à maîtriser son sujet. A la Beauté absorbée dans la contemplation de son miroir tandis qu’on la pédicure, un Faune soumet un pantin rouge, bras dressés, qui doit bien représenter quelque chose. D’autant que les chaussures vides du premier plan, ainsi que l’urne qui passait par là, soulignent la disponibilité de la Dame.


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1918 armengol guignol-hprints-com

Le Confident discret
H.Armengol, Fantasio, 1918

« A son Guignol silencieux,
N’en craignant pas les bavardages,
Elle peut, plaisir silencieux,
Conter tous ses marivaudages »

  • Au premier degré, cette illustration gentillette a au moins le mérite d’assigner au  pantin un rôle cohérent  : celui du confident discret ;
  • au second, on peut se demander si l’air désolé du Guignol et sa natte qui pendouille dans le dos, ne titillent pas le thème plus affriolant du spectateur muet, les bras levés symbolisant son impuissance à prendre part.


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Les Eternels Pantins
Maurice Pépin, le Sourire, Février 1918

Où se confirme une nouvelle fois la valeur érectile des bras levés : la belle femme fait manifestement de l’effet à la marionnette mâle, tandis que sa femelle l’attend avec son gourdin.  Les couleurs noir et rouge des pompons du chapeau et des chaussures reprennent celles du couple de créatures : accessoires parmi d’autres de l’Eternel Féminin.


sb-lineTheatre_Magazine_cover_1921-08Theatre Magazine, Août 1921

De ses poches pleines, la marionnettiste a sorti deux favoris qui s’opposent : un soupirant du temps jadis et un des temps modernes.


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1921 Icart

 Les deux amies et les marionnettes
 Icart, 1921

Après avoir épuisé  Pierrot, le Gendarme et Guignol (reconnaissable seulement à son chapeau noir), les deux amies s’en prennent à un Gnafron qui a tout du richard en goguette : il s’agit probablement d’un clin d’oeil  d’Icart à Thomas Couture, puisque ces quatre types de victimes correspondent exactement à ceux de La Courtisane moderne (voir 1 Les pantins précurseurs) : la Poésie, le Courage, la Jeunesse et la Richesse.


Encre de Lusche vers 1930

Encre de Lusché, vers 1930.

Même thème en plus explicite, réduit à deux victimes consentantes : le Clown blanc et l’Auguste.

Poupées

Sous la Femme Fatale, la Femme-enfant. Et sous le Pantin, la poupée...

Rassenfosse

Armand Rassenfosse le joujou 1892Le joujou, Rassenfosse, 1892 1896 rassenfosse poster-for-salon-des-centAffiche pour le Salon des Cent, Rassenfosse, 1896

Ces deux illustrations très ropsiennes datent d’avant le livre de Pierre Louÿs.

A gauche, une prostituée soumet le  pantin à l’érection simultanée des quatre membres. A droite, la Folie examine à la loupe une femme moderne, comme pour s’assurer que cette miniature d’elle-même est fidèle à l’original.

Il suffit de les comparer  avec l’oeuvre qui suit pour comprendre comment le livre a pu cristalliser en un thème chimiquement pur ce qui était jusqu’alors le sujet de fluctuantes variations symbolistes.


1898 rassenfosse-illustration La femme et le Pantin livre pierre Louis

Illustration pour La femme et le Pantin, Rassenfosse, 1898

Dès cette toute première exposition sont mises à jour toutes les oppositions binaires du thème   :

  • femme géante contre homoncule,
  • nudité contre habits de soirée,
  • posture fière contre avachissement,
  • chatte contre souris.

Les effets de lumière accentuent le suspense théâtral : la femme blanche à l’ombre noire va-t-elle laisser choir le pantin, du halo lumineux où elle l’exhibe vers l’obscurité du sol qu’il n’aurait  pas dû quitter ?

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L’homme aux poupées

Jean Veber, Salon de 1896

1896 Jean Veber L homme aux poupees

Cet étrange tableau, aujourd’hui disparu, rendit perplexe les commentateurs du Salon :

« L’enseignement moral de cette allégorie, en tout cas le morceau capital c’est l’insolente nudité d’une grande fille qui s’étale, jambes ouvertes, près de notre rêveur de chimères, sans qu’il daigne y jeter les yeux. Revanche, appel, ironie de la réalité méprisée ? Mystère. » [3]

Le mystère ne s’expliquera qu’en 1899, avec la parution de « L’Homme aux poupées », de Jean-Louis Renaud, avec quinze illustrations par Jean Veber.[1]

1899 Jean Veber Illustration pour l'hom

Illustration pour « L’homme aux poupées »
Jean Veber, 1899



Voici l’histoire dans ses grandes lignes   :

Le héros, « Menzel a une manie, qu’il satisfait à heure fixe. Chaque jour, à deux heures de l’après-midi précises, il entre dans une pièce plongée dans la pénombre et habitée par un petit peuple nombreux : ses poupées… Son plaisir est de les contempler, de les caresser, de les ranger. De les réparer aussi… Car cet excentrique s’est mis en tête que ses poupées ont, sinon une âme, du moins une sensibilité, qu’elles aspirent à vivre, qu’elles vivent, même, sous son regard et de son amour… Plus rien d’autre ni personne n’a d’importance à ses yeux, et certainement pas cette femme, Yane, actrice rencontrée un soir à l’opéra et qui l’importune, depuis, de ses assiduités. Elle est belle, pourtant, Yane, à faire tourner les têtes…. Comme la douceur et l’humilité n’ont pas l’effet escompté, elle passe à la vitesse supérieure et se dévêt devant lui, qui n’a d’yeux que pour une poupée, nue elle aussi. Alors, « humiliée, vaincue », prise à son tour de folie, une folie homicide, voilà qu’elle met en pièces le peuple des poupées sous les yeux effarés de leur roi, étrangement inerte… Prise de pitié et de remords, Yane prend alors pour le consoler l’apparence d’une poupée, ou d’un automate, le rôle d’Olympia des Contes d’Hoffmann d’Offenbach dans lequel Menzel l’avait vue la première fois, à l’opéra. » Résumé par Laurent Martin  [2]


L'Homme aux poupees affiche de film 1909 par Rodolphe Bereny

Affiche pour le fim « L’Homme aux poupées »,
Rodolphe Berény, 1909

Voici le stade final de cette transformation. A noter que, malgré le mode d’emploi détaillé (Haut-Bas-Fragile),  l’opulence de la Femme Début de Siècle  rend problématique sa chosification, à laquelle se prêtait  mieux l’exsangue Femme Fin de Siècle.


1899 Jean Veber Illustration pour l'homme-aux-poupees 2

Illustration pour « L’homme aux poupées »
Jean Veber, 1899

Cette précoce apparition du thème de la femme-objet flirte avec le fétichisme masturbatoire, mais relève également du fétichisme au sens religieux, selon l’analyse passionnante de Laurent Martin :

« La poupée, a fortiori l’automate en laquelle Yane doit se muer pour attirer l’attention de Menzel, est un être ambigu, matière inerte modelée à la semblance de l’humain, double sublimé du corps organique, qui participe de la matière et de l’esprit, à mi-distance de l’animé et de l’inanimé, mais aussi du profane et du sacré, à la fois jouet et idole. » [2]

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1902 F.Bac La reine du BalLa reine du Bal,
F.Bac, 1902
1902 ca Le lilliputienLe lilliputien
Wilhelm Schertel, date inconnue

Ces deux versions illustrent toute la richesse stylistique et métaphorique de la Belle Epoque : tandis que la femme-liane attire dans son cercle solaire, du bout de son éventail,  son Admirateur minuscule, la Garçonne dépoitraillée se moque gentiment de son Adorateur.


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1903 The San Francisco call December 27

The San Francisco call, 27 décembre 1903 

Au nouvel an, la fille moderne laisse tomber le vieux beau de l’année d’avant, démantibulé, pour en prendre un tout neuf, qu’elle va pouvoir faire tourner entre ses deux baguettes

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1917 ando fantasio

Chasseresse
Ando, Fantasio, 1917

« Si la chasse du gibier est interdite, la chasse à l’homme est toujours ouverte ».

Plutôt culotté, en pleine guerre mondiale, de tirer au pigeon des barbons et des généraux : manière de dire que c’est tout ce qui reste à l’arrière ?


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1917 Marion Davies by Henri Clive Ziegfeld FolliesMarion Davies par Henri Clive, Ziegfeld Follies, 1917 1919 Vargas Bessie LoveBessie Love,Vargas,1919

Deux idoles de l’Epoque, chacune avec son pantin mâle : la blonde a choisi le noir, la brune  préfère le blanc.


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1920 ca postcard-chcago-arcade-card-exhibit-supply-company-pin-up-woman-by-table-with-woman-puppet-Carte postale, vers 1920, Chicago 1920 ca postcard-chicago-exhibit-supply-company-arcade-card-pin-up-woman-in-scarf-with-puppet
Carte postale, vers 1920, Chicago

Même fille et même poupée : seuls changent le tissu de la robe et la hauteur du portage.


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1920carte postale 1
Carte postale, vers 1920
1920-del-marle-barbebleuette-profiteuse-puppets-hprints-com
Barbebleuette, Profiteuse, Del Marle, 1920

Jouer avec leur poupée intéresse encore les grandes filles. Certaines n’en ont qu’un, d’autres en un plein placard (numérotés de un à six comme les femmes de Barbe-Bleue).


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1922 Milliere La-Vie-Parisienne-La-Femme-et-le-Pantin
La Femme et le Pantin, Maurice Milliere, 1922, La Vie Parisienne« Et maman qui dit que je suis trop grande pour jouer à la poupée »
xxx Tu las bien dans le tiroir
« Tu l’as bien dans le tiroir, cette fois ! »

L’expression est attestée dès 1867… http://www.languefrancaise.net/Bob/5147



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1924 Fabius Lorenzi RivaliteRivalité, Fabius Lorenzi, 1924 1925 La Vie Parisienne Rene Vincent.La femme et ses pantins, René Vincent, La Vie Parisienne, 1925 
1929 Koister les-fetiches-a-la-mode-carte postaleKoister, Les fétiches à la mode, Carte postale, 1929

Le


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Eugene Reunier

La mariée, Eugène Reunier, années 20

Auréolée par un coeur ambigu, cette mariée réduit à l’essentiel son jouet en haut de forme.


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1929-maurice-milliere-la-femme-et-le-pantin-the-puppet-hprints-com
La Femme et le Pantin, Maurice Millière, 1929
1922 zaliouk-la menagerie de Line hprints-comLa ménagerie de Line
Zaliouk, 1922

Cherchez le Pantin ou cherchez le Singe : la réponse est dans le cadre.


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Privat Livemont 1931 Jeune femme nue aux poupees coll privee
 
Jeune femme nue aux poupées
Privat Livemont, 1931, collection privée

Lassée des poupons, de la mode et de la Commedia dell’Arte, la grande fille se consacre désormais à l’exotisme.



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Dream Man Earle K. Bergey Cover for La Paree - October, 1935L’homme idéal (Dream Man), Earle K. Bergey,  Couverture pour La Paree, Octobre 1935 1953 edward-runci-They're Easy To HandleIls sont faciles à manier (They’re Easy To Handle),
Pinup de Edward Runci,1953

Blonde Girl With Puppet - Driben - 1938

Peter  Driben, 1938

Qu’il ou elle soit de papier ou de chair , toujours la Femme domine ses pantins.

1958 Bardot

 Brigitte Bardot dans  « La Femme et le Pantin »
Phtographie de Robert Doisneau, Paris, 1958



Masques

La Femme et le Masque est un thème ancien et très large, qui  évoque la Comédie,  le Mensonge,  la Duplicité, la Comedia del Arte, la Fête Vénitienne etc…

Nous n’aborderons ici  que le  cas très particulier où le masque, par synecdoque, constitue le stade ultime du Pantin, décapité et évidé, réduit à une face vide.



Rops Heliogravure avant 1870 repris en 1889 comme Frontispice pour les Masques Modernes de Felicien Champsaur

Rops, Héliogravure (avant 1870) reprise en 1889 comme frontispice pour les « Masques Modernes » de Felicien Champsaur

Le thème de la femme nue brandissant un masque a été décliné par Rops dans sa série des Naturalia (voir 2 Les pantins de Rops). Mais la particularité de cette gravure est l’étalage de masques en trophées. En voici une description d’époque :

« Une aimable et plantureuse Folie, nue, debout, de face, doublement accoudée sur un entablement, supporte de sa main gauche gantée une tête coiffée de créneaux et panachée de flammes vives qui n’ont pu brûler le fil retenant à son crâne une grosse araignée. A ce signe distinctif, il est impossible de ne pas reconnaître le cerveau de Paris. Un bonnet phrygien, une marotte montée en éventail, un soupçon de ceinture maintenant à peine une batte, et un grand manteau dont les plis se couchent moelleusement à ses pieds composent le costume sommaire et suffisant de la belle fille.
Le socle de l’entablement porte des armes fantaisistes de Paris avec la devise : Fluctuat nec mergitur, enlaçant deux masques de personnages connus. Puis, au-dessus et dans le fond, accrochés, les masques d’Alexandre Dumas fils, Sarcey, Déroulède, Alphonse Daudet, Émile Zola, Aurélien Scholl, Charles Garnier, etc.  » Supplément au catalogue de l’œuvre gravé de Félicien Rops, par Erasthène Ramiro, 1885

L’auteur n’insiste pas sur la « batte » passée à la ceinture, instrument de dompteuse et attribut viril capturé.


Une explication visuelle (SCOOP !)

Les armes gravées sur le socle ne sont pas que fantaisistes : on y voit un bateau à aubes (modernisme) piloté par un amour ailé, et dont la vapeur, en sortant de l’écusson, fait écho à la flamme de la torchère.

Ainsi le sujet du socle – des parisiens jeunes et vieux réduit à des masques et gouvernés par l’Amour – explique la gravure dans son ensemble, mais en inversant les tailles : le grand écusson aux quatre créneaux devient le petit masque-torchère, et le petit Amour devient la grande dompteuse avec sa batte-gouvernail.


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1908 auguste francois gorguet The symbolism of the theater. Chromolithography for the newspaper, ComoediaAuguste Francois Gorguet
1908, Couverture de Comoedia, 15 décembre 1908, gallica

Dans cette révision aseptisée, la femme est le Théâtre et ceux qui la servent sont les masques des auteurs à la mode.


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1917 rassenfosse-la-marchande-de-masques-

La marchande de masques
Rassenfosse, 1917, Collection privée

Transposant l’idée de Rops, Rassenfosse transforme la dompteuse en montreuse, sur un théâtre de foire : tous ces masque de porcelaine sont ceux des hommes, jeunes ou vieux, beaux ou laids, qu’elle a mené à la baguette et dont elle a tiré les ficelles.   Tandis que tous ont les yeux clos, elle est la seule à les ouvrir, derrière son loup de velours.



1917 rassenfosse-la-marchande-de-masques-etude

La marchande de masques, Etude

Privée de son loup, la marchande de hasard redevient une Liégeoise ordinaire…

Pour un bon aperçu de l’oeuvre  de Rassenfosse : https://fr.pinterest.com/jeanjacqueswolf/armand-rassenfosse/


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1922 Masken LUDWIG LUTZ EHRENBERGER

Masques, Ludwig Lutz Ehrenberger, 1922

Ehrenberger importe le thème de Rassenfosse dans la Vienne des Années folles


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1916 Kirchner

Le Masque Japonais
Kirchner, 1916

La barbe et les yeux du drapeau redondent ceux du masque, pimentant le thème de l’impuissance par celui du voyeurisme. Comme souvent chez Kirchner, le japonisme fait passer l’érotisme.


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Femme entre crâne et masque
Ray Donley, 2006

La femme au masque de loup a vaincu le masque de porcelaine ; elle poursuit son tête à tête avec ce qui reste de son Jouet.


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1920 Leonnec-paravent-08-1

Quatre chinoises de paravent
Léonnec, la Vie parisienne, 1920

C’est ici au titre de la chinoiserie que le masque vient se faire titiller par la fille du troisième panneau.


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Maurice Millière, Fanny, vers 1930

La modèle emblématique de Millière, Fanny, est  ici mise à contribution dans une oeuvre aux sous-entendus multiples, illustrant des expressions variées : tailler une plume, servir de cache-sexe, torche-cul : au final, il semble que la Presse ne soit pas particulièrement flattée.



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Choisissez, Mesdames !
Maurice Millière, 1930

 Ici j’ai les portraits frappants
De ceux qui seront vos amants.

Même thème, en plus explicite et en moins classieux.


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La femme et les pantins
Maurice Millière, 1918

Même thème : la cocotte admire sa dernière acquisition, qui lui sourit, tandis que les précédentes font la gueule.


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1919_herouard__mask

Les masques de l’Amour
Hérouard, 1919

« Voyez-les mes amoureux
Mon coeur hésite entre les deux
La poésie et la finance :
entre les deux mon coeur balance ».

Même thème, réduit par la Garçonne à un choix binaire entre le Lunaire et le Lubrique.



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1925-30 Charles Gates Sheldon Photo de Mary WessonPhotographie de Mary Wesson, vers 1920 Charles Gates Sheldon Portrait de Mary WessonPortrait de Mary Wesson, vers 1920
Charles Gates Sheldon Portrait of Mary Wesson vers 1920
Charles Gates Sheldon The Glorified American Girl, Brown and Bigelow calendar pin-up, 1932The Glorified American Girl, calendrier Brown and Bigelow , 1932
Charles Gates Sheldon Lady with Puppet, The Saturday Evening Post cover, October 31 , 1925Femme avec poupée, couverture du  Saturday Evening Post , October 31 , 1925 1925-30 Charles Gates Sheldon The PuppetLa marionnette, 1925-30

Charles Gates Sheldon

Photographe de charme et dessinateur de pinups, Charles Gates Sheldon a abusé des poupées, masques et marionnettes pour occuper les mains de ses girls.



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1925 Beauty and the beast vargas

La Belle et la Bête
Vargas, 1925

Ici, il ne reste plus que le dernier choix. Cinq ans avant King Kong, la Blonde n’a pas peur de faire enrager le Gorille.



Références :

[0] George Lafenestre, La Peinture aux Salons de 1896, Revue des Deux Mondes, 4e période, tome 135, 1896, https://fr.wikisource.org/wiki/La_Peinture_aux_Salons_de_1896
[1] Pour l’ensemble des illustrations de l’Homme aux Poupées, voir https://jeanveber.com/2014/09/22/lillustrateur/