L’oiseau licencieux
L’oiseau devient parfois le support lubrique d’une imagerie licencieuse…
Phallus ailé et vagins sur un couvercle attique,
vers 450-425 av. J.-C., Musée national archéologique, Athènes
Trois noms sont inscrits : Philonides (sous le phallus), Auletria, et Anemone. Celui de la troisième demoiselle nous est inconnu.
Tintinnabulum
Bronze pompéien, 1er siècle ap JC
Le phallus ailé, orné de grelots, était un porte-bonheur courant chez les Romains. On n’en connaît pas la signification précise : allusion aux performances ascensionnelles de l’objet, au caractère volage de son possesseur, ou culte de la fertilité ?
« Purinega tien duro »
Cuivre gravé fin XVème, Italie du Nord, National Gallery of Art, Washington
Dans cette scène érotique exceptionnelle pour l’époque, un membre ailé à pattes griffues, portant le grelot des oiseaux de proie, vient rejoindre, sur une sorte de perchoir posé sur une branche, un couple pratiquant une position peu orthodoxe.
A noter qu’en italien, le terme « ucello » désigne le membre viril (la signification sexuelle des oiseaux dans l’Italie de la Renaissance a été etudiée en détail par Allen J Grieco [1]). Nous sommes donc en présence d’un oiseau monstrueux rejoignant un homme-oiseau en train d’exercer son oiseau.
Il ne faut pas trop compter sur le texte pour fournir une explication limpide : la traduction proposée par d’éminents spécialistes se rapproche de « Même si çà les détruisait (pur i (a)nega), que çà tienne dur ».
Une explication serait que les amulettes en forme de phallus ailé étaient une protection contre les mauvais sorts jetés à l’encontre de la virilité (voir [1a])
Le revers de la plaque de cuivre comporte une autre scène moins connue, foisonnant d’allusions sexuelles (expliquées dans [1], p 97)
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Notons que, depuis les Romains et bien avant Freud, l‘oiseau est associé au phallus et l’extension des ailes à l’érection.
Pour Allen J Grieco, cette association se renforce au Moyen-âge par le biais des théories médicinales et diététiques : les oiseaux, animaux chauds car habitants de l’Air, sont une nourriture qui échauffe les sens. C’est pourquoi les tableaux accumulant les volailles ont fréquemment une composante érotique.
Les volaillières
Bartolomeo Passarotti, vers 1580, Fondation Roberto Longhi
C’est le cas de la vieille femme en bouche à bec avec un coq, et de la jeune plumant contre sa plantureuse poitrine une dinde particulièrement turgescente (il suffit de la regarder à l’envers). Comme le fait remarquer Allen J Grieco ([1], p 125) :
« La signature ironique dans le coin inférieur droit du tableau, un moineau (passero) perché sur une cruche de vin, fait allusion au nom du peintre tout en ajoutant aux sous-entendus érotiques du tableau. »
Un des sous-entendus de l’image est celui de la prostitution :
La jeune femme s’expose et semble vanter ses charmes car elle est placée devant l’étal – voire sur l’étal : visuellement, son tabouret forme la continuité de la cage. Elle devient marchandise parmi les produits vendus. Tandis qu’elle croise les jambes, la jeune volaillère lève sa jambe droite et laisse voir sa chaussure et son bas. Cette « jambe en l’air » est un des signes de l’exhibitionnisme féminin ; ce motif obscène est repris ici par Passerotti. À cette idée, le peintre associe celle développée par certains auteurs de l’époque24 selon laquelle les activités de vente sont, pour les femmes, une couverture servant à masquer leur activité de prostitution. Si la jeune femme vend ses charmes, sa vieille compagne est alors l’entremetteuse qui sert d’intermédiaire entre le client et la prostituée. Valérie Boudier [1b]
La volaillière, Bartolomeo Passarotti, vers 1580, collection privée
Le coq est ici magnifié par une poularde roulée en boule devant lui, qui complète sa silhouette glorieuse.
Jeune homme avec un chardonneret et un nid dans un pot à oiseaux
Carel de Moor (II), vers 1700, Dulwich Picture Gallery.
A quoi le jeune homme sourit-il, sinon à la dimension manifestement masturbatoire du pot à oiseaux ?

L’oiseau privé, dit aussi Le couple et l’oiseau envolé
Boilly, fin XVIIIème, Louvre, Paris
Ainsi un tout petit oiseau peut parfaitement faire image : les particularités remarquables étant de se faufiler partout et de se déployer en envergure.
Ici la femme mesure, de ses deux mains, l’écart entre le signifiant et le signifié.
Mais de manière générale, l’oiseau le plus lubrique est le cygne au long cou. En voici quelques exemples choisis…
Léda et le cygne
Tintoret, 1555, Musée des Offices, Florence.
En figurant Leda et son cygne dans une chambre à coucher, Tintoret acclimate le mythe antique au décor des courtisanes vénitiennes.
« À droite de l’image, Jupiter transformé en cygne entre dans la pièce, séduit par la nudité de Léda ; un petit chien vient à sa rencontre. De l’autre côté, une servante amène une grande cage en bois contenant un canard ; un petit chat curieux le regarde intensément.
Les deux côtés de la toile se répondent de manière spéculaire. Le cygne et la cage sont coupés par le cadrage serré, et les actions des deux femmes, reliées par un jeu de regards et une correspondance de gestes, semblent narrativement coordonnées. Alors que Léda attire le cygne en le saisissant par le cou, la domestique apporte une cage suffisamment grande pour l’enfermer. Jupiter, traditionnellement au centre de l’action, est sur le point d’être piégé, victime de l’entente silencieuse entre les deux femmes…. Le chef des dieux, en se transformant en cygne, devient un « oiseau » comme un autre qui, séduit par Léda, est attiré dans un piège… Le perroquet et le canard encagés préfigurent la future situation de Jupiter. Ils ne sont pas de simples ornements de la chambre, mais des métaphores « de l’amour et de ses dangers » ». [2], p 56 et ss
Plus précisément :
« La cage est une métaphore courante du sexe féminin ; la présence du canard dans la cage figurerait un moment postérieur lors duquel Jupiter, pénétrant dans la métaphore du sexe de Léda, se trouve pris au piège et devient un simple animal domestique comme les autres présents dans l’image. »
Cette iconographie exceptionnelle visait probablement à produire un effet comique quant aux malheurs de Jupiter :
« Dans toutes les oeuvres et les textes antérieurs, le dieu fait coucher Léda sous ses ailes et il s’unit avec elle en utilisant l’astuce ou la force ; dans l’oeuvre de Tintoret, en revanche, Léda dirige l’action et Jupiter trompé devient la victime….En se transformant en oiseau, le dieu est littéralement « uccellato » et « fa una figura da uccello », c’est-à-dire qu’il « est pris au piège » et qu’il « se rend ridicule »… Non seulement il sera enfermé dans une cage, mais il devra partager cet espace confiné avec un canard, un animal beaucoup plus humble que lui » [2], p 58 et ss
La langue italienne complétait le comique de la situation de Jupiter par un comique verbal :
« À la Renaissance, le terme uccello désigne comme aujourd’hui le membre masculin et dans les comédies de la première moitié du XVIème siècle, l’archétype de l’homme piégé par ses excès libidineux est Calandrino, dont le nom signifie « oiseau enfermé dans une cage » … Pour un spectateur de l’époque, la vision de Jupiter représenté sous forme de cygne, le cou dressé entre les mains de la princesse est vraisemblablement très comique. » [2], p 63
Leda, quant à elle, prend la pose d’une courtisane vénitienne :
« La main de Léda, posée sur l’aile du palmipède, présente l’index allongé comme un digitus impudicus, les doigts de l’autre main glissent entre les draps défaits ; ces gestes, qui évoquent notamment l’acte sexuel, sont utilisés par Titien dans sa seconde version de Danaé. »
La cage est également à comprendre comme une spécialité vénitienne :
« Quant à la grande cage carrée, on peut facilement l’interpréter comme une allusion au supplice de la Cheba, utilisé jusqu’en 1518 par la Justice vénitienne pour punir les crimes les plus graves. La Cheba était une cage carrée suspendue à une poutre du clocher de saint Marc ou du palais des doges ; le condamné y était enfermé et exposé à la vindicte populaire jusqu’à ce qu’il meure parfois de faim et de soif. [2], p 63
Le couple du canard et du chat (voir Le chat et l’oiseau) fait comprendre la situation d’ensemble, ramenant le cygne divin à un vulgaire palmipède et réduisant la corps de la princesse à son centre principal d’intérêt .
Léda et le Cygne
Attribué à Boucher, vers 1740, Collection privée
Le long cou du cygne est ici exploité avec franchise, sans hypocrisie ni rétraction mythologique.
Thermidor
Gravure coloriée, entre 1804 et 1806
« Sous un soleil brûlant l’eau qui tombe en cascade
Et les jeux séduisants de ce Signe amoureux
Aux délices du bain invitent la Naïade
Qui dans l’onde limpide attiédira ses feux. »
D’une manière plus didactique, Léda démocratisée en une quelconque naïade est ici associée au signe du Lion, que l’on voit à la fois dans le ciel et sous forme de robinet dans la baignoire.
En porte-savon, un faune marin manie entre ses jambes une métaphore du bec, finalement plus prude que la version Ancien Régime de Boucher.
A noter le calembour de la légende : le Signe amoureux désignant non pas le félin astral, mais le palmipède entreprenant.
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Leda et le cygne
Concernant l’iconographie foisonnante de Leda et du Cygne, nous nous limiterons à ces quatre exemples peu connus, dans lesquels la plasticité du cou de l’animal est exploitée de manière particulièrement méritante.
L’éducation d’Orphée
Georges Callot, 1884, Châlons-en-Champagne, musée municipal
Une naïade jouant de la lyre attire un cygne jouant des ailes et du cou.
Le petit Orphée, encore incapable d’imiter la femme, imite l’oiseau, les bras ouverts, le cou dressé et l’oreille tendue. Un épi de roseau figure ce qui lui manque encore.
L’odalisque
Lord Leighton, 1862, Collection privée
Cette odalisque alanguie , dénudée d’un bras et d’un sein, observe le cygne blanc qui tend son cou vers elle et arrondit ses ailes. L’odalisque était, au harem, un jeune fille vierge mise au service des concubines en titre, dont le seul espoir était d’obtenir les faveurs sexuelles du sultan : d’où son regard rêveur. Les papillons, emblèmes de la beauté fugace, lui rappellent que son temps est compté.
L’éventail suggère que le cygne réagit à l’excitation sexuelle de la même manière que le paon, par cet hérissement de plumes.
« Suis-je assez belle pour attirer le sultan ? » telle est la question de l’odalisque.
Nicholas Kalmakoff a tout du cliché improbable : aristocrate russe né dans le luxe, il vécut dans la misère à Paris en se nourrissant de bouillon Kub et en voyant le diable à l’occasion ; mysogyne, narcissique et hautain pour se rendre insupportable à tous, mort à l’asile : quarante de ses tableaux furent retrouvés aux Puces en 1962 signés d’un K mystérieux (pour un aperçu de sa vie et de son oeuvre, voir http://visionaryrevue.com/webtext3/kal1.html).
Léda
Nicholas Kalmakoff, 1917
Léda et le cygne dans l’eau
Nicholas Kalmakoff, pastel, 1917
Léda vivait sur Terre, Jupiter dans le Ciel : en prenant forme de cygne, il la rencontra dans l’Eau, élément intermédiaire, dangereux pour elle, propice pour lui.
Rousse et couverte de bijoux comme une princesse sarmate, elle le repousse mollement sans perdre de l’oeil son bec avantageux.
Tandis qu’en haut le bras et le cou s’opposent dans un affrontement simulé, en bas les rotondités de la cuisse et du jabot s’accolent dans un rapprochement consenti.
Léda et le cygne sur terre
Nicholas Kalmakoff, 1917
L’animal de l’Air et de l’Eau s’est aventuré sur la Terre, dans un lit vert comme la fertilité et rouge comme la passion.
Le bras tendu vers son compagnon noir, la femme brune accueille simultanément le Sexe et la Nuit.
Attiré par le bec turgescent et les feuilles de lierre vulvaires, l’oeil ne prête pas attention à la patte griffue : le coït symbolique éclipse le coït physique.
Pour ses deux Léda, pour ces deux moments de l’Amour que sont la séduction et la satisfaction, Kalmakoff recourt au même procédé de composition :
le haut du tableau montre le simulacre, le bas la réalité.
Carte postale de la série Geishas
Raphael Kirschner, 1901
Traduction en version japonaise par le brillantissime Kirschner : les trois Lédas-geisha aux cheveux ornés de nénuphars – une blonde, une rousse et une brune – s’occupent chacune de son cygne, sous l’égide triangulaire du mont Fuji à l’horizon.
Léda
Jean-Adrien Mercier,août 1929, Archives municipales, Angers
De la Sinuosité Serpentine d’un cou(p) de Signe…
Cygne endormi (Sleeping swan)
Lithographie de Michael Parkes, 2000
Un cou replié, mais tout prêt, comme le suggère le lampadaire, à reprendre sa position verticale.
Autre caractéristique intéressante s’ajoutant à la longueur du cou : la longueur des pattes. C’est pourquoi, en variante du cygne trop connu, un autre type d’oiseau symbolique a été parfois utilisé comme accessoire pour dames : l’échassier.
Odalisque
Francesco Paolo Michetti, 1873
Commençons par un modèle miniature : l’ibis égyptien, noble comme l’orientalisme, rose et maniable comme un sex-toy avant la lettre.

Le Flamant rose
Benjamin Constant, 1876, Musée des beaux-arts de Montréal
Ce tranquille flamant tenté par un pamplemousse pourrait sembler tout à fait anodin, n’était la jarre béante qui lui fait pendant.
L’ambassade (Die Gesandtschaft)
Max Klinger, 1882, Musée des Beaux Arts, Leipzig
Le flamant, au cou intéressant, est envoyé en ambassade par deux marabouts guindés, comiquement plantés sur un seul pied. Malgré qu’ils se rengorgent, l’absence de goître les dénonce comme deux jeunes mâles inexpérimentés, qui délèguent les travaux d’approche à un entremetteur plus avantagé par la nature.
Second Intermezzo Rettungen Ovidischer Opfer, Opus II, 9
Klinger, 1879, Bristish Museum
Klinger avait probablement en tête cette composition réalisée trois ans plus tôt : l’Artiste, seul sur une plage et entouré de cactus, portraiture un marabout tandis que quatre Critiques, ses semblables, confèrent derrière lui.
Le Marabout dans le Harem
Gérôme, vers 1889, Collection privée
Cagneux et chauve, inconscient de sa laideur, le marabout déambule dans le bassin, déplaçant des poissons rouges qui ne le craignent pas, sous le regard moqueur des odalisques.
Il y a bien sûr de l’humour dans cette exhibition, par un vieil oiseau libidineux, d’un organe démesuré au milieu de femmes sarcastiques : les amateurs fortunés de la peinture de Gérôme étaient capables d’apprécier les nus voluptueux tout autant que leur propre caricature.
Diadumenè
Edward John Poynter, 1883, Royal Albert Memorial Museum, Exeter
L’alibi du classicisme permet à Poynter de risquer cette nudité, très crue pour l’époque en Angleterre, et qui le fera taxer d’immoralité : la Vénus de l’Esquilin aux Thermes.
Pour sa restitution des bras, Poynter imagine que la jeune fille attache ses cheveux avec un ruban, avant le bain. Dans une longue lettre au Times, il explique que c’est le petit doigt de la main gauche encore visible sur l’arrière de la tête, et la direction du ruban, qui lui ont inspiré cette reconstitution : bras gauche levé pour tenir les cheveux tandis que le droit enroule le ruban (voir [3])
L’oiseau peut se comprendre comme un témoin innocent – la projection autorisée du spectateur dans le tableau – bien que sa posture le classe dans la tradition des volatiles érectiles.
Diadumenè, 1893, Collection privée
Faute d’avoir trouvé un acheteur suffisamment audacieux, Poynter produisit cette seconde version, embarrassée de drapés et débarrassée de l’oiseau (remarquer la statue d’argent, dans la niche qui, pour enfoncer le clou, reproduit encore une fois la même pose).
Chasseur indien
George de Forest Brush, 1887, Collection privée
Brush s’est spécialisé dans les sujets indiens, peignant toute une série de guerriers bronzés ayant pour proie de prédilection les cygnes et les flamants roses. Voici un exemple dans lequel le long cou rivalise avec le long pagne, dans une composition qui pourrait s’intituler : le Repos du Chasseur.
Orphée
George de Forest Brush, 1890, Museum of fine art, Boston
A titre de curiosité, cet Orphée très athlétique, tenant sur son bas-ventre une lyre de compétition pour subjuguer des lapins sexuellement explicites.
Les oiseaux de Max Švabinský
Gravure de Max Švabinský, « Paradiesische Sonate », Drittes Blatt des Zyklus, 1920
A gauche et à droite, un Phalangère à fleurs de lys (dit encore Bâton de Joseph) et des ombelles sont attaqués par des insectes volants. Au centre, un flamant turgescent semble disposé à faire de même avec la cible que lui propose le faune.
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![]() Max Švabinský, 1907, Narodni Galerie, Prague |
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Le fantasme de la femme nue visitée par un oiseau revient plusieurs fois chez Max Švabinský…
Parasol jaune – été (Žlutý slunečník -Léto)
Max Švabinský, 1909, Collection privée
…jusqu’à cette concurrence fortuite, sur un tapis de plage, entre un faisan doré et un parasol.
Femmes et flamants roses
Hans Zatska, fin XIXème, Collection Privée
Prolifique metteur en scène de petites dames dans des compositions alimentaires, Zatska invente ici un décor composite, mi temple antique,mi boudoir, dans lequel deux prêtresses s’intéressent à deux flamants, lesquels s’intéressent… à un melon : de la réduction des nobles intentions à la métaphore juteuse…
Le soir magique, Hans Zatska
Même principe de « reductio ad libido » dans cet autre décor, en extérieur cette fois : une fille en déshabillé vaporeux – qui doit être une fée vu l’étoile brillant à son diadème – tend à une autre fille – qui doit être une princesse antique vu ses bijoux et ses sandales à la grecque – une luciole, le tout sous un croissant de lune.
Le détail scabreux est que le héron, en se tordant le cou pour lorgner l’insecte, pointe son bec vers l’entrejambe de la fée.
La tentation (the tease), Hans Zatska
Avec son habit traditionnel, revoici notre princesse, cette fois en tête à bec avec une cigogne en extension…
L’ironie étant que l’objet de cette émotion manifeste n’est pas la Belle dans son ensemble, mais la minuscule grenouille verte : le désir réduit à la gourmandise.
Le paravent japonais
Robert Lewis Reid
Circé et Anatole, Robert Lewis Reid, 1920-26, Akron Art Museum
Ce tableau s’inspire de la pièce Anatole de Schnitzler (1893) : ce riche séducteur est ici caricaturé sous forme d’un pantin à la mandoline démesurée, manipulé par Circé la Magicienne. Mais ce qui nous intéresse est le magnifique paravent japonais orné d’une grue, qui appartenait effectivement au peintre, et dont il a exploité dans une série de tableaux le potentiel symbolique.
Le paravent japonais, Reid, Collection privée
Le paravent prend ici la première place, l’oiseau crève l’écran, dominant de toute sa taille la femme nue.
Bleu et jaune, Reid, vers 1910, Collection privée
Acculée dans l’angle du paravent, entre la grue qui marche et la grue qui vole, la femme en kimono bleu semble résignée à subir une offensive combinée terre et air.
Le miroir, Reid, vers 1910, Smithsonian American Art Museum
Dans cette dernière itération, la femme en robe de soirée bleue est libre de ses mouvements. Elle dirige vers le spectateur un miroir circulaire, tout en frôlant le paravent du bras. Sans doute faut-il comprendre qu’elle a attiré l’oiseau avec son miroir aux alouettes, et qu’elle lui tend le bras pour qu’il s’y pose.
Devenue dominante et active, la femme dirige l’oiseau et choisit le moment.
Cartes postale aviaires
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Chicago, vers 1920
A gauche, l’oiseau monté sur colonne est tenu à l’oeil, flatté d’une main et mis en garde de l’autre par un index ambigu : lui est-il demandé de se tenir tranquille, ou d’atteindre la taille voulue ?
A droite, la taille obtenue semble plus que satisfaisante.
Oiseau
Mahlon Blaine, 1946, Collection privée
« Dans ce travail, le deuxième de la série, un oiseau mécanique menace la déesse nue à la chevelure de Méduse qui se recroqueville au sommet d’un robot en pierre, dans une palette rouge, blanc et bleu infusée de patriotisme américain » [4]

Le bronzage interrompu
Pinup de Gil Elvgren, 1960
L’ombre du pélican tombe sur la jambe de la belle, qui s’offusque, moins du cou considérable du volatile, que de cet attentat à son bronzage. L’humour réside dans les deux poissons bleus qui décorent le soutien-gorge, suggérant que l’oiseau, à la différence du spectateur, est plus attiré par le contenant que par le contenu.
Ce sujet bizarre s’est développé à partir de l’ombre de la main sur le mollet, dans la photographie originale.
Nid douillet
Mustapha Merchaoui
Ce tableau moderne pourrait illustrer une très ancienne métaphore rappelée par Grieco ([1] p 93) :
Le médecin Savonarole… écrit sur les prostituées de Ferrare, qui ont été autorisées par les autorités de la ville à garder leurs seins partiellement ou totalement découverts afin de combattre le vice corrompu contre nature (l’homosexualité masculine) et mettre l’oiseau sur la voie pour qu’il revienne dans le nid.
JHU Press, 23 févr. 2010, p 99 et sss http://books.google.fr/books?id=SaJdVmk_2oYC&pg=PT112&lpg=PT112&dq=to+standard+tendencies+of+the+northern+Italian+dialects:+purinega+can+be+read+as&source=bl&ots=FZjEOAiQoG&sig=A0Ka_ptLLrsbzn4jMGaYrpRHVbQ&hl=fr&sa=X&ei=NypiVNSCL43davbKgYgM&ved=0CCEQ6AEwAA#v=onepage&q=to%20standard%20tendencies%20of%20the%20northern%20Italian%20dialects%3A%20purinega%20can%20be%20read%20as&f=false
http://www.academia.edu/5757296/_Giove_uccellato_quand_les_m%C3%A9tamorphoses_se_font_extravagantes_in_E._Boillet_C._Lastraioli_ed._Extravagances_amoureuses_lamour_au-del%C3%A0_de_la_norme_%C3%A0_la_Renaissance_Paris_Honor%C3%A9_Champion_2010_p._40-70