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Carrache

2 Le Bouclier-Miroir : scènes modernes

9 octobre 2020
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La plupart des héros au bouclier  datent de l’antiquité (voir article précédent : 1 Le Bouclier-Miroir : scènes antiques). Mais quelques boucliers-miroirs ont été réinventés par la suite…

Bouclier contre miroir : Renaud et Armide

La Jérusalem délivrée, poème épique écrit en 1581 par Le Tasse, offrait au lecteur le plaisir de découvrir, sous de nouveaux habits, des histoires bien connues. C’est ainsi que les amours du chevalier chrétien Renaud avec la magicienne Armide recyclent, de manière transparente, ceux d’Ulysse et de Circé. Rajouter un miroir permet au Tasse d’évoquer la toilette de Vénus, et un bouclier le retour d’Achille au sexe fort.

Parmi les nombreux tableaux illustrant les épisodes de l’histoire de Renaud et Armide,  j’ai retenu ceux qui mettent en scène ces deux ingrédients.

Episode 1 : La rencontre de Renaud et Armide

1628-29 Nicolas Poussin - Rinaldo et Armida , - Dulwich Picture Gallery, Londres

Armide tente de tuer Renaud
Poussin, 1628-29, Dulwich Picture Gallery, Londres

Les manigances de la séductrice traversent tout le poème, mais son aventure avec Renauld commence au livre XIV. Assez rarement représenté en peinture, l’épisode de la rencontre place d’emblée l’histoire sous le signe de Narcisse et du miroir. Par les sortilèges d’Armide, Renauld s’est endormi sur une île du fleuve Oronte, que Poussin a représenté en haut à gauche..

« Alors Armıde sort de sa retraite et se précipite vers le guerrier pour accomplir sa vengeance; mais, à peine a-t-elle fixé sur lui ses regards et contemplé ce visage calme et paisible, ces yeux fermés où erre un tendre et langoureux sourire (et que serait-ce s’ils étaient ouverts !), qu’elle s’arrête incertaine… Puis, elle s’assied à ses côtés et sent fuir son courroux. Ainsi penchée vers lui, on la prendrait pour Narcisse se mirant dans le cristal des eaux... O prodige incroyable ! ce coeur plus dur que le diamant, plus froid que la glace, s’amollit sous l’influence des feux que recèlent ces paupières fermées. De cruelle ennemie elle devient amante. » ([1], p 258)


1730 ca Lapis Gaetano, Armida tenta di uccidere Rinaldo Galleria nazionale delle Marche

Armide tente de tuer Renaud
Gaetano Lapis, vers 1730, Galleria nazionale delle Marche

Pour traduire picturalement la comparaison entre Armide et Narcisse, Lapis rajoute au sol, sous l’arc de Cupidon et le poignard, un bouclier qui faut coup double : montrer la vulnérabilité de Renaud et introduire le thème du reflet, à la fois narcissique et fondateur de l’amour.

« La suspension de l’acte meurtrier résulte du pouvoir de séduction de Renauld endormi, mais aussi de la fascination que subit Armide en se reflétant dans Renaud et en y retrouvant l’image d’elle-même. Dans la philosophie néoplatonicienne de Marsile Ficin, le thème de l’amour est central et devient un fondement de la pensée de la Renaissance. Les théories exprimées dans le Libro de Amore voient dans la similitude et le désir du même le mécanisme par lequel on se prend au piège de la passion amoureuse : pour Armide, le reflet du visage de Renaud se grave dans son âme et la haine se transforme en amour. Réciproquement, lorsque Renaud se réveillera dans les Iles Fortunées, il se reflétera dans un miroir féerique qui le fera tomber follement amoureux d’Armide, perdant sa virilité guerrière et se féminisant ». Isabella Chiappara Soria [2].



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Episode 2 :  Le miroir qui enferme

1601 ca rinaldo-armida Carrache Musee de Capodimonte

Renaud dans le jardin d’Armide
Carrache, vers 1601, Musée de Capodimonte

Au livre XVI, Armide retient donc Renauld prisonnier, par les sortilèges d’un miroir magique, dans un jardin enchanté où deux compagnons d’arme (Ubalde et Charles)  vont venir le délivrer. Vingt ans après la parution de la « Jésusalem délivrée », Carrache fixe ici l‘iconographie de référence :

« Les deux chevaliers, cachés derrière les arbres, contemplent cette scène voluptueuse : au côté de l’amant (amante) pend une arme étrange, un miroir. Armide soulève et place aux mains de son amant ce confident des amoureux mystères. Elle, d’un air riant, lui, avec des yeux. brillants, ne voient qu’un même objet dans les diverses figures qui s’y réfléchissent ; elle y cherche ses charmes; il se mire dans les yeux d’Armide ; elle ne voit qu’elle-même, et il ne voit qu’elle. Elle est fière de son empire, il est glorieux de ses fers. « Tourne, lui dit-il, ah ! tourne vers moi ces yeux qui font mon bonheur. Si tu l’ignores, sache que mes transports sont la fidèle peinture de tes attraits ! Bien mieux que ce cristal, mon amour te donnera une idée de la puissance de ta beauté. Si tu me dédaignes, hélas ! contemple du moins ton gracieux visage, et tes regards que rien ne peut satisfaire seront heureux ! Mais comment un miroir reproduirait-il tant de charmes ? Comment un si petit espace renfermerait-il tant de merveilles ? Le Ciel peut rendre tes perfections; c’est dans les astres que tu retrouveras ton image. » Armide sourit à ce langage, mais elle ne cesse de s’admirer et de composer ses atours. » ([1] p 275 et ss)


1601 ca rinaldo-armida Carrache Musee de Capodimonte detail regards

Dans le texte, les deux regardent ensemble dans le miroir, mais n’y voient pas la même chose : la solution picturale est un jeu de regards dissymétriques qui rend bien le fond, à défaut de la forme.


1601 ca rinaldo-armida Carrache Musee de Capodimonte detail

Le bouclier salvateur, encore caché, est annoncé par la rotondité des casques et de l’arcature.


Domenichino - Rinaldo ed Armida, 1620-21 - Musee du LouvreLe Dominiquin, 1620-21, Louvre, Paris 1635 Matiia Preti Rinaldo nel giardino di Armida Ambassade des Etats-Unis RomeMattia Preti, 1635, Ambassade des Etats-Unis, Rome

Renaud dans le jardin d’Armide

Le Dominiquin, en style classique et Mattia Preti, en style caravagesque, reprennent la même composition, et traduisent le mimétisme amoureux et la féminisation de Renaud de deux manières inventives :

  • par les bras droits identiquement levés, l’un tenant le manche du miroir et l’autre le fer à bouclettes ;
  • par le miroir qui semble refléter le visage d’Armide, alors qu’il s’agit de celui de Renaud.


1690 ca gregorio-lazzarini-rinaldo-e-armida Narodna galerija Slovenije Ljubljana

Renaud dans le jardin d’Armide
Gregorio Lazzarini, vers 1690, Narodna galerija Slovenije, Ljubljana

Lazzarini joue ici avec les codes désormais bien établis : il transforme en détail Charles and Ubalde et supprime le bouclier de cristal, pour mieux le suggérer dans l’arche brillante de l’arrière-plan.



1690 ca gregorio-lazzarini-rinaldo-e-armida Narodna galerija Slovenije Ljubljana detail
Le miroir montre une lanière délacée : emblème de la douce captivité et de la libération imminente. Mais aussi transcription graphique, à côté des perles, d’un nouveau détail, la ceinture magique que décrit ainsi le Tasse :

« Cependant le plus précieux ornement d’Armide est sa ceinture qu’elle ne quitte jamais. Pour la former, elle donna une substance à des choses impalpables, et la composa d’éléments qu’aucune autre main n’eût pu saisir. Les amoureux dépits, les attrayants refus, les tendres caresses, le calme heureux, le sourire, les mots entrecoupés, les larmes du plaisir, les soupirs interrompus, les doux baisers, tels sont les objets qu’elle réunit et qu’elle trempa au feu le plus doux. C’est ainsi qu’elle créa le tissu merveilleux qui entoure sa belle taille. » ([1] p 279)


1755 tiepolo rinaldo-et-armida-dans-son-jardin Art Institute of Chicago

Renaud dans le jardin d’Armide
Tiepolo, 1755, Art Institute of Chicago

En style rococo, Tiepolo se sert des deux sphères de pierre pour mettre en symétrie le poison et son antidote : le miroir et le bouclier.


1771 ca Angelica_Kauffmann_-_Rinaldo_and_Armida Yale center for British art

Renaud dans le jardin d’Armide
Angelica Kauffmann, vers 1771, Yale center for British art

En style néo-classique, Angelica Kauffmann revient à la composition de Carrache, en rajoutant l’idée originale du bouquet tenu au dessus de la tête, qui se réplique dans la couronne de fleurs, puis plus bas dans les fleurs tombées autour du miroir, emblème de la féminisation de Renaud….



1771 ca Angelica_Kauffmann_-_Rinaldo_and_Armida Yale center for British art detail
…bouquet qui se reflète à l’arrière dans le bouclier libérateur.


Kauffmann, Angelica, 1741-1807; Rinaldo and Armida

Renaud dans le jardin d’Armide
Angelica Kauffmann, vers 1772, Kenwood, National-Trust

Dans ce tableau réalisé l’année suivante (pour son pendant, voir 1766 -1782 (période anglaise) ), Angelica inverse la composition et remplace le bouquet par un autre symbole de doux esclavage : la guirlande, qui trouve son écho à terre dans le ruban serpentant autour du miroir.


1812 Rinaldo et Armida par Francesco Hayez Accademia Venise

Renaud dans le jardin d’Armide
Francesco Hayez, 1812, Accademia, Venise

Toujours en style néo-classique, cette oeuvre de jeunesse de Hayez lui a valu la prolongation d’un an de sa bourse d’études à Rome. Brigitte Urbani [3] a souligné les nombreux emprunts du jeune peintre à des oeuvres connues, et son application à démontrer sa connaissance du poème :

Rinaldo_e_Armida1812-13 Francesco_Hayez Accademia detail

  • par le détail rare de la ceinture dénouée, vers laquelle l’oeil est conduit en suivant le ruban violet du miroir, mollement tenu par la main droite d’Armide ;
  • par le trophée d’armes accroché au tronc, qui anticipe un passage postérieur :

« Ils se dirigent vers cette clarté, et bientôt ils en distinguent la cause. Ils voient, suspendues au tronc d’un arbre, des armes neuves que viennent frapper les rayons de l’astre des nuits. Sur un casque et une armure d’or, des pierres précieuses étincellent d’un feu plus vif que celui des étoiles. Une longue suite de tableaux est ciselée sur le vaste bouclier » Livre XVII ([1] p 302)


Un parcours optique et érotique (SCOOP !)

1812 Rinaldo et Armida par Francesco Hayez Accademia Venise schema

Graphiquement, la composition propose à l’oeil un parcours en zig-zag entre les points de lumière : depuis la colonnade du fond jusqu’au casque du soldat-voyeur puis, en passant par la cascade qui annonce la cotte de maille, jusqu’à celui de Renaud ; de là il se réfracte sur le lac, puis sur le bouclier inutile, où le reflet du pied d’Armide imprime sa domination ; la ceinture le renvoie au miroir, qui révèle la source de toute cette attraction : un succulent morceau de fessier.


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Episode 3 : Le bouclier qui libère

1650-55 Rinaldo and the Mirror-Shield Maffei Getty Museum
Renaud et le bouclier de cristal
Maffei, 1650-55, Getty Museum

« Dès que la magicienne, appelée par des soins plus sérieux, s’est retirée, les deux guerriers sortent du bosquet qui les cache et se présentent à Renaud, revêtus de leur pompeuse armure… A la vue de cette armure éclatante, le héros, quoique livré à la mollesse, quoiqu’engourdi par le plaisir, sent renaître son ardeur. Ubalde s’avance et place sous ses yeux le bouclier de diamant. Dans ce miroir fidèle, il voit ses vêtements et sa chevelure, disposés avec un art efféminé et imprégnés de parfums ; son glaive, chargé de vains ornements, n’est plus une arme terrible, mais un inutile jouet. Et tel qu’un mortel, au sortir d’un lourd et profond sommeil, ne reprend ses esprits qu’après une longue rêverie, tel le guerrier revient à lui. Bientôt il ne peut soutenir la vue de sa propre image. » ([1] p 275 et ss)


Armide dans les bras de Renaud, XVIIeme, musee de la Tapisserie, Aubusson

Armide dans les bras de Renaud, XVIIème siècle, Musée de la Tapisserie, Aubusson

En plus du côté boulevard des deux voyeurs, et décoratif du Jardin paradisiaque, le sujet avait pour avantage de recycler et superposer plusieurs thèmes bien connus : la Toilette de Vénus (grâce au miroir à mains), les Amours jouant avec les armes de Mars (grâce ici au miroir en diamant, confié à un amour au mépris de la narration). Formule « tout en un » qui avait tout pour séduire.


Rinaldo Views His Image in the Diamond Shield, carton Simon Vouet, Manufactory of Raphael de la Planche. ca. 1633-1637 Flint Institute of ArtsAteliers de Raphael de la Planche, vers 1633-1637, Flint Institute of Arts Rinaldo Views His Image in the Diamond Shield, carton Simon Vouet, Manufactory Alexander de Comans (active 1634-1654) coll privAteliers d’Alexandre de Comans, collection privée

Renaud voit son image dans le miroir en diamant
Cycle de tapisseries d’après des cartons de Simon Vouet

Le carton dessiné par Vouet laissait visiblement une certaine latitude d’interprétation : la première tapisserie illustre l’histoire à la lettre, en montrant dans le bouclier une tête efféminée ; le deuxième interprète le texte, avec une horrible tête barbue qui traduit le côté monstrueux de la situation.



Rinaldo Views His Image in the Diamond Shield, carton Simon Vouet, Aubusson coll part
Cette troisième version, en format horizontal, supprime le miroir à main et réveille un autre thème : et si la tête monstrueuse était celle de Méduse ?



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Episode 4 : Renaud abandonne Armide

La fin du livre XVI est consacrée à la longue séparation sur la plage : discours manipulateurs d’Armide, ferme résolution de Renaud soutenu par ses compagnons. A bout d’arguments et de colère, Armide s’évanouit.

« Ces mots expirent sur ses lèvres ; et, succombant à ses angoisses, elle tombe presque inanimée ; une sueur froide se répand sur son corps ; ses paupières s’abaissent… Tes yeux se ferment, Ô Armide! le Ciel avare te refuse cette dernière consolation. . Malheureuse! regarde et tu verras des larmes amères inonder les yeux de ton ennemi. Oh ! quelle douce joie si tu pouvais entendre ses soupirs !… C’est tout ce qu’il peut t’accorder… Ses derniers adieux sont des regards de tendresse et de commisération ! Il part. Déjà les légers Zephyrs se jouent dans la chevelure de leur guide, et la voile d’or pousse l’esquif vers la haute mer. Les yeux du héros sont fixés sur le rivage, qui bientôt disparait. »


1580-90 Andrea Semino Rinaldo guarda Armida nello specchio Palazzo Bianco Genes

Renaud abandonne Armide
Attribué à Andrea Semino, 1580-90, Palazzo Bianco, Gênes

Cette composition étrange et équivoque, imaginé très peu de temps après la parution du roman, montre Fortune guidant la barque vers la plage, et Renaud tenant le miroir de cristal (non mentionné dans le texte) dans lequel Armide évanouie est montrée au spectateur : le but étant de rapprocher l’image des deux concurrentes, mais aussi de superposer le départ subreptice de Renaud à un autre épisode spéculaire : Thésée s’approchant avec son glaive de Méduse endormie.


1614 Renaud abandonne Armide Lanfranc Kunsthaus Zurich

Renaud abandonne Armide
Lanfranc, 1614, Kunsthaus, Zürich

C’est Lanfranc, quelques années plus tard, qui met au point la représentation canonique de l’épisode : le bouclier, frontière entre les deux femmes, reflète vaguement la silhouette de Renaud.


1639-46 Charles Errrard les adieux de Renaud a Armide Bouxwiller, Musee du pays de Hanau

Renaud abandonne Armide
Attribué à Charles Errard, 1639-46, Musée du pays de Hanau, Bouxwiller

Errard inverse la composition et place le miroir de manière à ce qu’il reflète Fortune.


1750 ca Tiepolo Rinaldo+Abandoning+Armida Villa Valmarana Vicence

Renaud abandonnant Armide
Tiepolo, vers 1750, Villa Valmarana, Vicence

Dans cette composition d’une clarté parfaite, Tiepolo élimine Fortune et positionne en pendant, dans une symétrie terre / mer, le miroir qui a perdu son pouvoir et le bouclier désormais inutile.


1680 Ronaldo and Armida by Luca Giordano coll part

Renaud abandonne Armide
Luca Giordano, vers 1680, collection particulière



1680 Ronaldo and Armida by Luca Giordano detail
Giordano synthétise l’aventure dans le détail, plus rhétorique qu’optiquement réaliste, du bouclier qui ne reflète plus que l‘index décidé du héros requinqué.



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Tancrède et Herminie

poussin 1630 ca ermitage--Tancrede-et Herminie

Tancrède et Herminie
Poussin, vers 1630, Ermitage, Saint Pétersbourg

Ce tableau, consacré à un autre couple célèbre de la Jérusalem délivrée, montre toute une série d’objets brillants :

  • l’épée, qui reflète la main d’Herminie et sa chevelure qu’elle coupe en signe de deuil ;
  • les boucliers qui encadrent Tancrède agonisant ;
  • le soldat mort à l’arrière-plan.



poussin 1630 ca ermitage--Tancrede-et Herminie cuirasse de Vafrino
Mais c’est sur un reflet imperceptible dans le dos de l’armure de Tancrède que Jonathan Unglaub s’est concentré : il y voit un autoportrait mélancolique de Poussin, qui pourrait tout aussi bien relever de la paréidolie [4].



Néo-boucliers

Les boucliers se raréfiant, quelques artistes leur ont trouvé des équivalents circulaires, pour nous poser d’intéressantes devinettes graphiques…

Le « bol de soupe » de Hummel

La gigantesque vasque de granit commandée en 1826 par le roi de Prusse Friedrich Wilhelm III, la plus grande du monde, ne fut mise en place temporairement qu’en 1831, et installé officiellement en 1834. Hummel a réalisé quatre tableaux immortalisant la réalisation de ce chef d’oeuvre patriotique.


Hummel_Das_Schleifen_der_Granitschale_1831

Vasque de granit dans la polisseuse à vapeur
Hummel, 1831, Alte Nationalgalerie, Berlin

Après sa découpe et son transport fluvial, la coupe fut meulée et polie à Berlin pendant deux ans et demi, grâce à une machine spéciale installée à peu de distance de l’Altes Museum, inauguré en 1830, où il était prévu de l’installer [5].

Le professeur Hummel était un praticien bien connu de la perspective, des ombres et des reflets, et il a très certainement voulu ici égaler le réalisme des primitifs flamands, en l’appliquant à un sujet résolument moderne [6].


1831 Johann Erdmann Hummel Polishing the Granite Basin for the Lustgarten

Vasque de granit polie dans la polisseuse à vapeur
Hummel, 1831, Alte Nationalgalerie, Berlin

Il existe une seconde version du tableau, avec personnages : celui en haut de forme, à droite, est l’inspecteur en bâtiment et tailleur de pierre Christian Gottlieb Cantian, responsable du projet.


Un reflet-mystère (SCOOP !)

1831 Johann Erdmann Hummel Polishing the Granite Basin for the Lustgarten detail

Le seul reflet figuratif est celui des quatre fenêtres et de la porte de l’atelier, dans lequel les commentateurs s’étonnent de voir un lac qui n’existait pas à l’emplacement du bâtiment : certains l’interprètent comme une allusion au voyage fluvial qui a précédé le polissage.

Voyez-vous la véritable explication ?

Voir la réponse...

1831 Johann Erdmann Hummel Polishing the Granite Basin for the Lustgarten detail B

Il s’agit en fait d’un piège visuel que l’on comprend en observant la partie droite : la courbure de la vasque a la propriété de créer deux reflets, l’un dans le sens naturel sur sa partie supérieure, et l’autre tête-bêche sur sa partie inférieure. Hummel a réglé la perspective de manière à ce que le reflet dupliqué de la porte donne l’impression d’un lac.



Die Granitschale auf dem Transport by Hummel 1828 Stiftung Stadtmuseum Berlin, perte de guerre

La mise en place de la vasque en granit
Hummel, brûlé pendant la guerre au Märkischen Museum

Finalement, la vasque étant trop grande pour l’emplacement initialement prévu à l’intérieur du Musée, elle fut installée devant : on remarque les échafaudages sur la façade du musée encore en construction. La superstructure de levage donne l’occasion à Hummel d’une démonstration de géométrie projective, par ses reflets sur la vasque et ses ombres longues sur le sol.


1831 Hummel_Granitschale_im_Lustgarten_anagoria Alte National galerie Berlin
Vasque de granit au Lustgarten
Hummel, 1831, Alte Nationalgalerie, Berlin

Le quatrième tableau montre la vasque mise en place provisoirement (il reste des blocs à insérer dans le socle). On reconnaît à gauche Cantian en haut de forme à côté d’un militaire. A droite les deux enfants en vêtement vert sont les fils de Hummel, Fritz et Erdmann.



1831 Hummel_Granitschale_im_Lustgarten_anagoria Alte National galerie Berlin detail A
Mais le tableau est une avant tout une apothéose des reflets : inversés sur la face inférieure, ils se redressent sur la partie convexe et s’inversent à nouveau sur la partie concave (c’est la raison d’être du promeneur sur le chemin).


Lustgarten 2004

Lustgarten, 2004

La vasque se trouve toujours au Lustgarden, mais elle a perdu depuis longtemps son polissage et ses reflets.



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Stevan Dohanos' 19 octobre 1946 Saturday Evening Post

Big Game of the Season
Stevan Dohanos, Saturday Evening Post, 19 octobre 1946

Les cinq musiciens, quatre garçons et une fille, appartenaient à la fanfare de la Staples High School de Westport, Connecticut, la ville où vivait Dehanos. Ce qu’ils tentent désespérément de suivre des yeux n’est pas leur chef d’orchestre, mais l’action de football américain qui se déroule sur la droite (Dohanos a bien pris soin d’inverser les numéros sur les maillots).


Affiche Music-man 20012001 Affiche Music-man 20162016

Affiches pour le spectacle « Music-man » des Staples Players

La première version, en 2001, est auto-réflexive ; celle de 2016 montre dans le soubassophone le personnage d’Harold Hill, le «music man» du spectacle [7].



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desperate_measures Svetlin velinov

Desperate Measures, Carte « Le bouclier de la Foi », Wizards of the Coast, édition OBSCURE ASCENSION
Svetlin Velinov, 2011

Les trois monstres portent le même uniforme. On vérifiera facilement que la main droite de chair, en avant-plan, appartient nécessairement à un quatrième.

Article suivant : 3 Reflets dans des armures : Pays du Nord

Références :
[1] Le Tasse, La Jérusalem délivrée, Livre XIV, traduction Philipon de la Madeleine, 1855 https://books.google.fr/books?id=JHu6PboMg9EC
[2] Isabella Chiappara Soria « Armida nella pittura barocca Sei-Settecentesca » https://www.saladelcembalo.org/histories/armida1.html
[3] Brigitte Urbani. « Francesco Hayez et Le Tasse. Renaud et Armide. Les réécritures de la Jérusalem délivrée », José Guidi, Raymond Abbrugiati, 2002, Aix-en-Provence, France. pp.179-200. https://hal-amu.archives-ouvertes.fr/hal-01760688/document
[4] Jonathan Unglaub « Poussin’s Reflection », The Art Bulletin Vol. 86, No. 3 (Sep., 2004), pp. 505-528 https://www.jstor.org/stable/4134444
[5]
https://de.wikipedia.org/wiki/Granitschale_im_Lustgarten
https://nightoutatberlin.de/der-geist-der-maschine/#_edn30
https://sensetheatmosphere.wordpress.com/2013/06/21/johann-erdmann-hummel-das-schleifen-der-granitschale-die-granitschale-im-lustgarten-1831/
Images en haute définition :
https://sammlung-online.stadtmuseum.de/Details/Index/170899
https://sammlung-online.stadtmuseum.de/Details/Index/170900
[6] Marsha L. Morton « Johann Erdmann Hummel and the Flemish Primitives: The Forging of a Biedermeier Style » Zeitschrift für Kunstgeschichte 52. Bd., H. 1 (1989), pp. 46-67 (22 pages) https://www.jstor.org/stable/1482457
[7] https://06880danwoog.com/2016/10/19/76-trombones-5-musicians-2-posters-1-painting/

1 L'index tendu : prémisses

15 avril 2018
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Le geste du doigt pointé est un des plus répandu en peinture : mais avant l’époque moderne, presque aucun peintre n’a osé le diriger vers le spectateur.



1 Dans le plan du tableau :

une rhétorique codifiée et subtile

Le paiement du tribut par Masaccio 1426-27 Chapelle Brancacci eglise Santa Maria del Carmine Florence

Le paiement du tribut
Masaccio, 1426-27, fresque de la Chapelle Brancacci, église Santa Maria del Carmine, Florence

Le Paiement du tribut illustre un passage de Matthieu (17, 24-27) où Jésus tranche la question de l’impôt exigé par la synagogue. Il conteste cet impôt mais estime qu’il ne faut pas manquer à la règle des pharisiens. En conséquence, il demande à Pierre d’aller chercher l’argent dans la gueule d’un poisson, puis de le remettre aux autorités.

Dans le groupe central, trois index tendus, avec des nuances différentes, permettent de lire chronologiquement les trois temps de l’histoire :

  1. L’index de Jésus fait le signe du commandement.
  2. L’index de Saint Pierrre mime celui de Jésus, exprimant la compréhension de l’ordre ; il désigne en même temps le lieu de la deuxième étape, à gauche, avec le poisson.
  3. L’index du percepteur exprime la persuasion, l’insistance ; il désigne aussi le lieu de la troisième étape, à droite, celle du paiement.



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La rhétorique de Raphaël

« Le dernier mot de l’art, c’est de concilier la force du geste avec la beauté du mouvement, la chaleur du vrai avec la dignité du style. C’est en quoi Léonard de Vinci et Raphaël sont incomparables; Raphaël en particulier a eu le secret de faire entendre, par la mimique de ses figures, plus de choses encore qu’il n’en fait voir. » [1]



Rapahel Loggia du Vatican La Reine de Saba 1514- 1519

La Reine de Saba
Raphël, Loggias du Vatican, 1514- 1519

Un soldat vu de dos montre la Reine de Saba, laquelle montre à Salomon les cadeaux qu’elle lui amène.

Le personnage qui désigne la scène à regarder et relaye le regard du spectateur vers le fond du tableau est un procédé très courant, celui de l’« admoniteur » (qui donnera naissance plus tard à la Rückenfigur, même figure sans le geste du bras, voir 2 Le coin du peintre).


Adoration du veau d'or, Raphael et eleves, Vatican, Loge de Raphael

L’Adoration du veau d’or
Raphël, Loggias du Vatican, 1514- 1519

Depuis l’avant et depuis l’arrière de l’image, deux mères pointent le doigt vers le Veau d’Or, pour inculquer à leur enfant ce culte impie.



Rapahel Loggia du Vatican Les Songes de Pharaon 1514- 1519

Les Songes de Pharaon
Raphël, Loggias du Vatican, 1514- 1519

Rien moins que quatre index cohabitent avec des significations différentes, dans cette composition qui ressemble à un exercice d’école : éloquence (Joseph), perplexité (Pharaon), menace (l’homme en manteau rouge) et admonition (l’homme en manteau jaune)



Raphael Transfiguration

La transfiguration
Raphël, 1518-20, Musées du Vatican

Cinq index tendus ici, dont quatre avec la même signification de désigner :

  • deux femmes désignent l’enfant possédé,
  • l’un des apôtres, en vert, le montre aux autres,
  • l’apôtre en rouge montre le Christ, seul capable de guérir l’enfant.

Enfin, dans le coin en bas à gauche, un autre apôtre tend lui aussi le doigt vers le Christ, avec une nuance d’appel à l’aide.



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Le geste de l’Ange Gabriel

Mais c’est dans les Annonciations que la vocabulaire gestuel trouve son élaboration maximale, comme le montrent ces deux exemples particulièrement originaux :

The Annunciation, c.1623 Orazio Gentileschi Galleria Sabauda, TurinL’Annonciation, Orazio Gentileschi, vers 1623 ,Galleria Sabauda, Turin 1622 Orazio GentileschiGenova - San SiroL’Annonciation, 1622, Gentileschi, Eglise San Siro, Gênes

Chez Gentileschi, l’Ange fait le signe, index levé, de celui qui prend la Parole, et Marie, paume en avant, de celle qui la reçoit.


L'Annonciation, Poussin, 1657, National Gallery, LondresL’Annonciation, Poussin, 1657, National Gallery, Londres 1656 Nicolas Poussin L'annonciation Chateau de Schleissheim (Munchen) GemaldegalerieL’Annonciation, Poussin, 1656, Château de Schleissheim, Gemäldegalerie, Münich

Chez Poussin, Marie ouvre ses paumes comme le livre ses pages et la colombe ses ailes, tandis que l’Ange fait compas entre la Vierge et le Ciel.



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Le geste de Saint Jean Baptiste

Carrache Vierge et saints 1588 Dresden, Gemaldegalerie Alte Meister,

Vierge et saints
Carrache, 1588, Dresden, Gemaldegalerie Alte Meister

Jean-Baptiste a annoncé « celui qui vient après moi ». Le geste de l’index tendu est donc l’un des signes distinctifs du Précurseur, avec la peau de bête et le bâton de berger bricolé en croix, références à sa vie dans le désert.


Annibale Carracci. The Baptism of Christ. 1584 San Gregorio, Bologna detail

Le baptême du Christ (détail)
Carrache, 1584, église de San Gregorio, Bologne
Cliquer pour voir l’ensemble

Dans cette ambitieuse oeuvre de jeunesse, Carrache illustre avec une grande finesse le passage de l’évangile de Jean :

« Or ceux qu’on lui avait envoyés étaient des Pharisiens. Et ils l’interrogèrent, et lui dirent: « Pourquoi donc baptisez-vous, si vous n’êtes ni le Christ, ni Elie, ni le Prophète ? » Jean leur répondit: « Moi je baptise dans l’eau; mais au milieu de vous il y a quelqu’un que vous ne connaissez pas, C’est celui qui vient après moi; je ne suis pas digne de délier la courroie de sa chaussure. » Jean 1.1,24-27

Carrache nous montre la chaussure rouge en bas, posée sur les vêtements de Jésus. Il nous montre trois pharisiens, dont l’un fait le geste classique d’énumérer des arguments, avec ici un sens bien précis : les trois doigts illustrent littéralement la phrase « ni le Christ, ni Elie, ni le Prophète ». Et surtout, avec les trois jeunes gens qui, en bas à gauche, forment l’antithèse des pharisiens chenus, il se livre à un festival de rhétorique gestuelle :

  • un enfant montre le ciel : sans doute son innocence lui permet-elle de voir la gloire angélique qui s’y déploie ;
  • au dessus, un jeune homme, tout en enlevant sa chemise, désigne Jésus qu’il va suivre ;
  • en bas, un adolescent plus jeune, qui lui aussi se destine au baptême, sert d‘admoniteur au spectateur.

En confiant aux jeunes gens toutes ces variations sur le geste emblématique du Baptiste, Carrache développe un contrepoint graphique qui a dû ravir les connaisseurs.


Gustave_Moreau_-_l'Apparition1876-77 Harvard Art Museum

L’Apparition
Gustave Moreau, 1876-77, Harvard Art Museum

Incidemment, Gustave Moreau opèrera le même type de transposition, ou plutôt de transgression, en faisant faire à Salomé le geste même de sa victime, chargée de toute l’ironie du corps complet envers la tête tranchée. Dans la version de Harvard (la plus aboutie), le garde à la pique ensanglantée, figé et couvert de la tête aux pieds,  fait contraste avec la nudité ondulante dont la seule arme est cet index qui, dans le même geste « danse, envoûte, regrette, ordonne et condamne. » [2]



2 Vers le fond du tableau

Un effet de zoom, qui aiguille le regard vers un détail l’arrière-plan.

carrache-le-choix-d-hercule-1596 Capodimonte Naples

Le choix-d’Hercule
Carrache, 1596, Musée de Capodimonte, Naples

« A gauche, Minerve montre à Hercule hésitant le chemin escarpé de la gloire, au haut duquel caracole Pégase, le cheval ailé qui en frappant le sol de son sabot fit jaillir la source Hippocrène de l’inspiration poétique : Pégase était aussi l’emblème de la famille Farnèse, pour qui le Carrache peignit cette toile. Aux pieds de Minerve, un dieu ouvre le livre de l’Histoire. Derrière, une souche d’arbre mort manifeste que le bon chemin est aride et traverse d’abord un sol stérile.
A droite, Vénus de dos, à demi dévêtue, déploie ses charmes devant Hercule. Sur une table à ses côtés le masque du théâtre, une partition musicale, un tambourin et un violon. Elle sème des fleurs mais devant elle la forêt luxuriante ne laisse pas la place à un chemin.«  [3]

Dans ce paysage moralisé d’une implacable symétrie, l’index de Minerve désigne le chemin ascensionnel qui mène à l’Immortalité, depuis le livre jusqu’à l’envol vers une nouvelle gloire ; celui de Vénus le chemin de la Chute, comme chutent les pétales de rose éphémères.



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abraham bloemaert - Boy Pointing at Tobias and the Angel 1625–30 Minneapolis Instituteof Arts

Jeune berger montrant Tobie et l’Ange
Abraham Bloemaert, 1625–30, Minneapolis Institute of Arts

Blomaert fait ici de l’admoniteur le personnage principal. Son rôle est de faire communiquer les deux zones qui, dans le goût hollandais de l’époque, offrent deux tableaux pour le prix d’un :

  • une scène profane au premier plan, ancrée dans le présent et le réalisme le plus détaillé ;
  • une scène sacrée à l’arrière-plan, qui ajoute un alibi religieux à la jouissance de la nature morte.



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bartolomeo-schedoni-st.-john-the-baptist-in-a-landscape coll privee

Saint Jean-Baptiste dans un paysage
Bartolomeo Schedoni, début XVIIeme, collection privée

Saint Jean Baptiste montre le Christ minuscule qui, lui-même montre l’auberge d’Emmaus [4]. S’enfoncer vers le fond du tableau, c’est parcourir l’Evangile en raccourci, depuis l’annonce de la venue sur terre de Jésus jusqu’à la preuve de sa résurrection.


Ph. de Champaigne, Saint Jean-Baptiste, 1657 musee de Grenoble
Saint Jean-Baptiste
Ph. de Champaigne, 1657, Musée de Grenoble

Le procédé graphique de l’index tendu vers le fond se double ici encore d’une intention théologique :

« …Une fois captivé, le regard est sommé par le doigt pointé du dernier des prophètes de se porter au-delà de cette belle image, vers un personnage flou, lointain, presque invisible, et pourtant « plus grand » que Jean-Baptiste, pour qui sait voir… Le personnage bleuté, à peine esquissé, est ainsi le point où vient s’épuiser l’art de peindre, et une invitation à ne pas se contenter du royaume visible. » [5]



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michiel sweerts - Autoportrait au crane 1660 caAgnes Etherington Art Centre

Autoportrait au crane
Michiel Sweerts, vers 1660, Agnes Etherington Art Centre

L’index qui montre le crâne est aussi une sorte de pied de nez ironique, qui insiste sur tout ce qui lui manque : la chair, l’ample manteau, les cheveux longs, le grand chapeau.


Saint Thomas_Caravage
L’incrédulité de Thomas
Caravage, 1602-03, Sanssouci, Potsdam

Faisant mine de pénétrer dans la cavité du nez, le geste est aussi un clin d’oeil à la composition fondatrice de Caravage (voir 3 Voir et toucher).



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Pietro Paolini 1620-80 Portrait d’homme Toulouse, Fondation Bemberg

Portrait d’homme
Pietro Paolini, 1620-80, Fondation Bemberg, Toulouse

On ne connaît pas l’identité de l’homme, mais le panonceau donne l’explication du tableau :

Vivere vita datur
Si vivis Apollinis
Arte
He<ic> su<m> perpetuo
vivus Apellis
Ope

ll te sera donné de vivre une vie,
si tu vis
de l’art d’Apollon,
Mais moi je suis pour l’éternité
vivant grâce à
l’œuvre d’Apelle

Il s’agit donc d’opposer la brièveté de la Poésie – l’art d’Apollon (symbolisée par le squelette d’enfant assis sur les livres fermés) et la pérennité de la Peinture – l’art d’Apelle.



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Carlo Maratta Josue arretant la course du soleil Collection Motais de Narbonne

Josué arrêtant la course du soleil
Carlo Maratta, vers 1680, Collection Motais de Narbonne

Ce tableau dérive très probablement des cartons préparatoires destinés à la réalisation des mosaïques de la chapelle de la Présentation dans la Basilique de Saint-Pierre. La combinaison de la contre-plongée avec le double raccourci des bras déploie la composition dans les trois dimensions de l’espace.


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maurice-quentin-de-la-tour-autoportrait-a-l-index-ou-l-oeil-de-boeuf 1737 Louvre

Autoportrait à l’index ou l’oeil-de-boeuf
Maurice Quentin de la Tour, 1737, Louvre

Chez Quentin de la Tour, l’artiste moqueur prétend désigner au spectateur, à travers l’oeil de boeuf, une scène amusante de l’arrière-plan. Sans doute il la lui montrera une autre fois, manière élégante de se moquer de lui.


Roslin__Marie-Suzanne_-_Selfportrait_-_c._1775 coll privee
Autoportrait
Marie-Suzanne Roslin, vers 1775, collection privée

Marie-Suzanne Roslin échafaude un niveau supplémentaire de profondeur dans cet hommage habile à son maître, où elle se représente à la fois en élève appliquée, et en alter-ego au féminin.



3 Vers l’avant du tableau

 Un effet spécial spectaculaire.

Dürer-autoportrait--enfant----2Autoportrait à l’âge de treize ans
Dürer, 1484, Albertina, Vienne
Autoportrait Pontormo 1522-1525 British MuseumAutoportrait
Pontormo, 1522-1525, British Museum

Ces deux croquis intimes réalisés dans un miroir, à quarante ans de distance, encadrent le moment, au début du XVIème siècle, où l’index ose passer du plan du tableau à son orthogonale.

La première oeuvre connue de Dürer est aussi un des tous premiers autoportraits de l’art européen. La mention manuscrite indique :  » J’ai fait celà en me regardant dans un miroir alors que j’étais encore un enfant . » Ce qui intéresse le jeune artiste est de réussir à représenter avec ressemblance son visage de trois quarts. L’index tendu n’est sans doute qu’un procédé naïf pour résoudre la difficulté éternelle des autoportraits d’artiste (voir Le peintre en son miroir : 1 Artifex in speculo), en attirant l’oeil sur la fausse main droite et en le détournant de la véritable, celle qui dessine, ici camouflée par le vêtement.

De l‘autoportrait probable de Pontormo, on ne sait pas grand chose, sinon qu’il a peut être servi d’étude lors de l’élaboration d’une fresque maintenant disparue pour la Chartreuse du Val d’Ema à Galluzzo [6]. Il est clair que, contrairement à Dürer, Pontormo ne cherche pas du tout à dissimuler la présence du miroir, même s’il le place en hors champ. Son défi est de rendre impressionnant le raccourci du bras tendu. Il est remarquable que la solution adoptée (minimiser la taille du visage) soit, comme nous le verrons bientôt, l’inverse de celle qui sera retenue par les affichistes modernes (augmenter la taille de la main).


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C’est à Raphaël que l’on doit les premiers index vraiment dirigés vers le spectateur, sans pour autant que le regard suive le doigt…

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rafael_-_madonna_sixtina_gemaldegalerie_alter_meister_dresde_1513-14Madonne Sixtine
Raphaël, 1513-14, Gemäldegalerie Alte Meister, Dresde
raphael-autoportrait-avec-un-ami 1518-20 LouvreAutoportrait avec un ami
Raphaël, 1518-20, Louvre, Paris

Dans la Madonne Sixtine, il s’agit d’un geste d’intercession : à l’avant de ce théâtre mystique dont les rideaux verts viennent de s’ouvrir, Saint Sixte désigne de l’index droit les spectateurs à la Vierge, en implorant d’en bas sa pitié ; celle-ci les regarde à son tour en leur offrant l’Enfant Jésus.

Etrangement, le dernier autoportrait de Raphaël reprend le même système de relais visuels : l' »Ami » tend l’index droit vers le spectateur en se retournant vers plus haut que lui, le Peintre qui nous fixe d’un regard pénétrant.



Raphael et son maitre d'armes gravure de Audoin, dessin de le Fort1806
 Raphaël et son maitre d’armes gravure de Audoin, dessin de le Fort,1806

 

La signification précise de ce tableau intime est inconnue, de même que l’identité du personnage qui porte la main gauche au pommeau de son épée, ce pourquoi on l’interprétait autrefois comme un maître d’armes. Mais les gestes les plus significatifs sont ceux que l’on remarque à peine dans le tableau, bien visibles sur la gravure : Raphaël a posé sa main gauche sur le bras qui touche l’épée, et glissé sa main droite sous le bras qui pointe en avant, comme s’il voulait retenir l’homme armé.

Le tableau a subi plusieurs retouches et recoupes, ce qui le rend à tout jamais indéchiffrable [7]. Si son état initial était bien celui que montre la gravure de 1806, sa signification devient plus claire : la présence de la balustrade exclut l’idée d’une attaque retenue (de plus on ne combat pas de la main gauche) ; et celle de la colonne situe la scène dans une sorte de loggia surélevée, situation très comparable à celle de la Madonne Sixtine.



Raphael comparaison sixtine autoportrait
L’expression christique du « divin Raphaël » (ainsi qu’on l’appelait déjà de son vivant) répond à celle de la Vierge, à la fois bienveillante et supérieure. Et la main droite du peintre glissée sous le bras de son ami imite la main droite de Marie glissée sous le bras de l’enfant Jésus.

Le double portait devient alors une sorte de double « Ecce Homo » où l’intercesseur présente son public au Peintre, lequel en retour le présente au public comme son fils spirituel.



Raphael comparaison Jules Romain
La comparaison avec l’autoportrait de vingt ans plus tard, aux Offices, rend crédible d’identifier celui-ci avec Jules Romain, principal disciple et ami de Raphaël (je me suis permis de lui rajouter quelques cheveux et de raccourcir la barbe, afin de le rajeunir).


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Carracci Domine Quo Vadis (1601-02) National Gallery, London

Domine Quo Vadis
Annibal Carrache, 1601-02, National Gallery, Londres

Factuellement, l’index pointe ici vers l’avant du tableau. Mais, montrant à Pierre la direction de Rome où Jésus lui commande de retourner, il ne désigne pas encore le spectateur : néanmoins, il le situe implicitement dans le camp inconfortable des Romains, ceux qui martyrisent et qu’il faut convertir.


Cathedrale_Saint-Just_de_Narbonne_-_Tobie_et_l'ange_-_Tournier_Nicolas_-_1635-1636Tobie et l’ange
Nicolas Tournier, 1635-36, Cathédrale Saint-Just,Narbonne
1635-38 Augustins_-_Le_portement_de_la_croix_-_Nicolas_TournierLe portement de la croix
Nicolas Tournier, 1635-38, Musée des Augustins, Toulouse

L’index se déplace vers l’avant, mais toujours pas pour désigner le spectateur. A gauche il s’agit d’indiquer le chemin, à droite de commander à Simon de Cyrène d’aider Jésus à porter sa croix.



4 Pointer du doigt  ET  fixer du regard 

Une audace tardive…

Murillo Enfant riant 1655-60 Coll priveeEnfant riant
Murillo, 1655-60, Collection privée
Pere Borrell Del Caso. Deux fillettes riant, 1880 Museu del Modernisme de BarcelonaDeux fillettes riant, Pere Borrell Del Caso, 1880 ,Museu del Modernisme, Barcelone

Il faut attendre Murillo pour, que, caché sous l’alibi de l’espièglerie enfantine, un peintre ose enfreindre le tabou et montrer du doigt son spectateur tout en le regardant en face  : tant il est vrai que ce n’est pas poli !

Deux siècles plus tard Pere Borrell, spécialiste des personnages en trompe-l’oeil surgissant du tableau, reprendra l’idée de Murillo.


Joseph Ducreux 1793 Self-portrait of the artist in the guise of a mocker Musee de la Revolution francaiseAutoportrait de l’artiste sous les traits d’un moqueur
Joseph Ducreux, 1793, Musée de la Révolution française
Ducreux-moqueurJoseph Ducreux, Collection privée

Joseph Ducreux, reprend la tradition de son maître Quentin de la Tour et pousse un peu plus loin l’art du persiflage, en défiant ouvertement le spectateur. La version de 1793 est devenue une icône sur internet, dernier regard ironique de l’Ancien Régime sur les Temps modernes.


jealous_husband_ducreux
Un mari jaloux
Attribué à Joseph Ducreux, collection privée

Autre type d’intrusion dans l’espace privé du spectateur : l’effraction. Ayant poussé le volet avec fracas, coiffé d’une plume et perché en haut d’une échelle intérieure, le mari jaloux inverse, ridiculement, la figure de Roméo.

Mais son escopette, prolongement métaphorique de l’index, n’ose pas encore menacer le spectateur.



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Federico Carlos de Madrazo y Ochoa portrait d'arthur-chaplin 1904 collection BBVA

Portrait d’Arthur Chaplin
Federico Carlos de Madrazo y Ochoa, 1904, collection BBVA

Cocó de Madrazon, de la quatrième génération d’une famille d’artistes, pastiche ici le style du XVIIIème siècle pour ce portrait plein de vie d’un autre fils de peintre et condisciple de l’atelier Bonnat, son ami Arthur Chaplin.


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Domenico Fontana 1585-87 Fontaine Acqua_Felice_RomaMoïse
Domenico Fontana, 1585-87, Fontaine de l’Acqua Felice, Rome
La Volonte Henri Maclot et Paul Martignon 1899 Nancy Temple maconniqueLa Volonté
Henri Maclot et Paul Martignon, 1899, Temple maconnique, Nancy

On sait depuis l’épisode malheureux de la fontaine de Moïse, qui valut à Fontana les moqueries des romains, que le geste de l’index impérieux n’est pas des plus aisés à manier, surtout en contre-plongée.

Carlos Schwabe 1906 etude pour la vague A Carlos Schwabe 1906 etude pour la vague B Carlos Schwabe 1906 etude pour la vague C

Etudes pour La vague
Carlos Schwabe, 1906-07
Carlos Schwabe La vague 1907 Musee d'art et d'histoire de Geneve

La vague
Carlos Schwabe, 1907, Musee d’art et d’histoire de Geneve

Carlos Schwabe l’a néanmoins multiplié, et poussé à un sommet difficile à surpasser.



Références :
[1] Charles Blanc, Grammaire des arts du dessin,1976, p 524
[2] Notice du Musée Gustave Moreau https://www.timeout.fr/paris/musee/musee-gustave-moreau/l-apparition
[3] S.Lojkine, http://utpictura18.univ-montp3.fr/GenerateurNotice.php?numnotice=A0646
[4] Si ce tableau est bien celui de la collection d’Este, décrit par Giuseppe Soli dans l’inventaire de 1797, voir http://www.sothebys.com/en/auctions/ecatalogue/2014/old-master-paintings-n09102/lot.48.html
[5] Port-Royal et les images : entre idolâtrie et iconoclasme, Tony GHEERAERT http://ceredi.labos.univ-rouen.fr/public/?port-royal-et-les-images-entre.html
[6] https://www.britishmuseum.org/research/collection_online/collection_object_details.aspx?objectId=715663&partId=1&searchText=Jacopo+Pontormo&page=1
|7] http://theswedishparrot.com/autoportrait-avec-un-ami-par-raphael/

 

 

 

Catégories

  • Interprétations
    • = EN APARTE =
      • – La progéniture de Vénus
      • – Le Diable dans la Crèche
      • – Le temps des Innocents
      • – Naissances mythiques : Vénus et Attis
      • Vulcain, Vénus et Mars alchimiques
    • = ICONOGRAPHIE =
      • – Dieu sur le globe
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      • – Au doigt et à l'oeil
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      • – Autoportait rétrospectif
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        • – Exécutions capitales
        • – Le crâne de cheval dans la peinture flamande
      • – Fuite en Egypte
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        • – Reflets armés
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      • – L'art et la charnière
      • – La bonne aventure
      • – La fabrique des ruines
      • – Le décor révélateur
      • – Le perroquet et le chien
      • – Le sexe dans l'oeil
      • – Les brebis et les boucs
        • – La parabole de la séparation
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